Mystery Men : la parodie de super-héros géniale et oubliée ressurgit en vidéo

Simon Riaux | 10 août 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Simon Riaux | 10 août 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

S’il jouit d’une popularité certaine auprès des spectateurs qui l’ont découvert, on ne peut pas dire que ces derniers soient pléthore. Un constat d’autant plus déprimant que Mystery Men eut pour lui le malheur d’arriver trop tôt sur les écrans, quand son sujet et son traitement auraient dû en faire un film culte. 

Casting impérial, direction artistique affolante et univers immédiatement reconnaissable... Impossible de cocher toutes les cases qui auraient dû faire de l’unique long métrage de fiction de Kinka Usher un succès, tant rétrospectivement le film semble taillé pour se payer les faveurs des spectateurs. Et c’est sans doute là ce qui fait la valeur première de l’exceptionnelle édition “Ultime” disponible depuis le 21 juillet 2020. 

 

photoDVD, Blu-Ray, Steelbook... L'Atelier d'Images a fait les choses bien

 

RETOUR VERS LE FUTUR 

Décembre 1999, à quelques semaines d’un bug de l’an 2000 qui ne viendra jamais, surgit de nulle part, tout de cape et de collant vêtu, une comédie roublarde, qui se moque des super-héros. Et dès cette équation d’origine, on peut sentir combien le projet est simultanément un miracle et un hors-sujet. Pensé comme un pastiche super-héroïque tournant en ridicule les personnages emblématiques tant de Marvel, de DC, que de l’âge d’or du pulp, le métrage doit probablement son existence à quelques exécutifs convaincus de rire d’un sous-genre destiné aux ados finis au coca tiède. 

Or, Mystery Men, s’il rit de ses personnages, reste avant tout un hommage enamouré aux comics, mais aussi à un certain cinéma de studio, riche de décors démentiels et de costumes hauts en couleurs. Dès les premières images, il est évident que le spectateur n’a pas affaire à une parodie en plastique, tant le budget de 68 millions de dollars (important pour une comédie à l’époque) se voit. 

 

photo, Greg KinnearLe Captain Admirable, victime d'un terrible complot ourdi par Casanova Frankenstein

 

Le découpage est extrêmement soigné, la photographie à la fois référencée et splendide, parfaitement adaptée tant aux décors urbains, qu’aux explorations nostalgiques d’une certaine Amérique de banlieue, ou encore les retrouvailles mélancoliques avec une patine qu’on jurerait issue de Flash. Luxueuse et fourmillant d’innombrables hommages et idées tordues, cette comédie qui joue de son faux rythme avec un sens consommé du naufrage provoque autant d’admiration que de rires nerveux. 

Malheureusement, en 1999, pour l’essentiel des spectateurs de cinéma, les super-héros sont limités à Batman et Superman, leurs adaptations de gentilles pitreries pour ado. L’Internationale Geek n’a pas encore pris le pouvoir sur le box-office, X-Men de Bryan Singer ne sortira que l’année suivante, et Spider-Man de Sam Raimi attendra 2002 pour laisser toute une génération à genoux.  

 

photo, Ben StillerHeureusement, Ben Stiller veille à son grain

 

SUPER-ARCHEOLOGIE 

Par conséquent, impossible de parodier un genre encore si peu identifié, de s’en faire apprécier de la critique, ou tout simplement de rembourser un budget confortable.  Ne rapportant que 33 millions de dollars, le film se fait assassiner par une partie de la critique, quand les cinéphages, pour l'essentiel, ne connaissent tout simplement pas les créations auxquelles le film fait référence. Et ces Mystery Men de tomber presque instantanément dans l'oubliTout l’intérêt de la présente édition est donc de nous donner à revoir (ou à découvrir) ce film thématiquement visionnaire, qui comprend beaucoup de ce qui fera l’apanage pour les super, tout en bénéficiant d’un investissement artistique de la part de son studio qui fait aujourd’hui cruellement défaut à la plupart des blockbusters du genre. 

 

photo, Paul ReubensPaul Reubens vous prépare une putride big adventure

 

Et quoi de mieux pour revisiter cette pépite oubliée qu’une édition telle que celle-ci, dont l’écrin renferme un master HD qu’on désespérait de trouver dans le commerce en France. Tout n’est pas parfait bien sûr, et on s’étonne un peu du manque de punch de certaines séquences, notamment nocturnes, mais globalement, réévaluer Mystery Men en blu-ray, est enfin l’opportunité d’apprécier le fantastique boulot de design et de cadrages accompli sur le métrage. 

Ben Stiller, Geoffrey Rush, Greg Kinnear, Tom Waits, Paul Reubens ou encore William H. Macy pouvaient paraître un peu étouffés, affadis par des éditions précédentes qui ne rendaient pas justice aux couleurs de la photographie, aux textures de leurs costumes. Ces affronts sont enfin réparés, alors que le film enchaîne les contre-plongées outrées et les décors rocambolesques.  Grâce à la définition et au piquet que recèle ce steelbook, le souvenir des copies fatiguées, des VHS de fortune ou des DVD pas franchement glorieux va pouvoir s'estomper.

 

photo, Hank AzariaLe talent de Hank Azaria se situe plutôt dans la fourchette haute de l'humour

 

 

BONUS ET MALUS 

Le constat est un peu plus mitigé mais pas moins intéressant concernant les bonus. Scindés entre bonus d’époques et créations réalisées spécifiquement pour cette édition ultime, ils sont d’un intérêt variable. L’interview contemporaine du metteur en scène s’avère ainsi beaucoup plus pertinente que son commentaire audio, où l’on sent bien qu’il ne peut évoquer frontalement l’étrangeté du projet, ou son orientation ultra-référencée. 

Il en va de même pour les interviews des comédiens, réalisées lors de la promotion du film. Elles témoignent assez clairement de combien pour une partie d’entre eux, caricaturer les super-héros est une sorte d’angle mort difficilement transmissible au public, soit que les intéressés connaissent mal le matériau d’origine, soit qu’ils le considèrent comme très éloigné du spectateur moyen. 

 

photoA-t-on déjà mieux roulé sa pelle ?

 

Une situation paradoxale, tant Mystery Men part aujourd’hui adapté au public, abreuvé de super-héros, désormais capable de les apprécier sous un autre jour, comme l’ont récemment prouvé les succès de Joker et The Boys. Adapté et cruellement hors du temps, son humour à base d’échecs, de bides, de slapstick pipi-caca étant un peu passé de mode.  

C’est ce qu’essaie entre autres d’établir Quentin Durand dans un module vidéo introduisant l’oeuvre et ses enjeux. Des tiraillements géniaux, des paradoxes en pagaille, qu’on retrouve notamment dans les nombreuses scènes coupées. Tantôt excellentes et tantôt franchement dispensables, elles témoignent toutes de la tendresse avec laquelle le film embrasse un pan de la culture populaire, et ne demande plus qu’à être redécouvert pour ce qu’il est. 

Curiosité qui achevait les années 90 mais ne parvient pas à se projeter jusque dans les années 2000, Mystery Men est un trip injustement oublié, qui mérite d’être enfin redécouvert, pour la marrante étrangeté qu’il nous inocule et que la présente édition de L’Atelier d’Image a su conserver et transmettre. 

 

photoDéjà dans les bacs

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commentaires
Seringas
12/08/2020 à 00:06

Même sans super pouvoirs je n'aurai pas aimer recevoir un coup de pelle !????

SimoneRibail
11/08/2020 à 23:13

Bon, monsieur simon riaux a decidement des gouts de films tres etrange.
Mais au moins, depuis quelques temps, on peut trouver des articles sur des films qu il aime, et pas juste sur des films qu il a envie de fracasser juste pour le plaisir.
Monsieur riaux a peut etre enfin reussi a ramener une femme sous sa couette, et ca le rend un peu moins aigri en ce moment ;)

Elvis6
11/08/2020 à 22:55

Film culte .

Simon Riaux
11/08/2020 à 14:18

@Flo

Non, ce que vous décrivez là, c'est une mauvaise parodie, et probablement un mauvais film. Rien ne spécifie qu'une comédie ne doit pas donner à ses personnages de véritables enjeux et conflits.

Dans le cadre de Mystery Men on est vraiment à mi-chemin entre parodie et pastiche, mais j'ai préféré opter pour le terme le plus accrocheur, connu des lecteurs et susceptibles de leur donner une idée du film et de l'article.

Flo
11/08/2020 à 14:07

Mauvaise définition, ce n'est pas une parodie... Car les personnages et tout le film ont un développement réel, à hauteur des ambitions de ces héros losers mais attachants.
Alors que dans une parodie, il n'y a pas une once de sérieux, que de la dérision.

bhuygc
11/08/2020 à 13:36

"Grâce à la définition et au piquet que recèle ce steelbook,"

Vous vouliez dire "au piqué" j'imagine ?

Geoffrey Crété - Rédaction
11/08/2020 à 09:56

@cepheide

Non. Quand y'a un partenariat, on le mentionne. Et quand on a envie de parler d'un film super cool avec une belle édition DVD/BR, on le fait nous-mêmes, quand on a le temps. Si on était payés pour parler de tout ce qu'on aime, on serait en télétravail aux Bahamas là.

Empeureur18
11/08/2020 à 08:07

Un des meilleurs films parodiques avec GALAXY QUEST

cepheide
10/08/2020 à 23:26

Publié reportage ????

Pat Rick
10/08/2020 à 20:14

Sympa mais rien de génial.

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