Thank You For Smoking : Critique

Ilan Ferry | 8 septembre 2006
Ilan Ferry | 8 septembre 2006

"Fumer tue et peut provoquer l'impuissance". Bien avant que ces quelques messages à caractères informatifs ornent les paquets de cigarettes, la dénonciation des méfaits de la nicotine et des puissants lobbys qui en contrôlent la vente avaient déjà été au centre du magnifique Révélations, machine de guerre imparable menée par un Michael Mann au sommet de son art. Pour son premier film, Jason Reitman, fils du réalisateur de Sos Fantômes, n'entends pas marcher sur les traces du grand Mann… du moins pas au sens classique du terme !

C'est de famille serait-on tenté de dire à la vue de ce Thank you for smoking qui traite son sujet sur le ton de la comédie. Toutefois, contrairement à son père, Jason Reitman ne s'aventure pas sur les sentiers de la comédie consensuelle mais sur celui beaucoup plus sinueux du pamphlet n'épargnant rien ni personne. À travers Nick Naylor (Aaron Eckhart) figure du capitalisme dans toute sa splendeur, le réalisateur tente le pari gonflé, voire casse gueule, de rendre attachant une belle ordure aussi baratineur que charismatique. Un défi relevé haut la main grâce à un Aaron Eckhart, tout simplement génial en lobbyiste cynique, qui trouve ici le rôle de sa vie.

 

 

En effet, si son personnage défend l'indéfendable, il le fait avec un panache tel qu'on en viendrait presque à être convaincu du bien fondé de ses propos, c'est dire le talent du monsieur ! Malgré ce que son sujet laissait entendre, le film ne joue pas la carte de la propagande anti ou pro tabac, et préfère prend les traits d'un gentil jeu de massacre égratignant tout le monde. Certes, ce premier long-métrage ne nous apprend pas grand chose et enfonce nombre de portes ouvertes, mais avec un humour si corrosif qu'il en devient jouissif. L'occasion pour le réalisateur de livrer une satire cinglante sur les dérives d'une société enfermée dans les contradictions du politiquement correct, comme le témoigne la séquence du talk show confrontant Nick Naylor à un jeune cancéreux… ou comment se sortir avec les honneurs d'une situation à priori inextricable en mettant dans sa poche une foule prête à vous lyncher ! Des tours de force comme celui-ci, le film en contient à la pelle.

 


Toute médaille a son revers et Thank you for smoking ne déroge pas à la règle. En effet, si Aaron Eckhart se fend d'une interprétation tout simplement hallucinante, il éclipse au passage une belle galerie de personnages (de l'agent adepte du mode de vie japonais au vieux cowboy désabusé en passant par un sénateur dépassé) et porte le film entièrement sur ses épaules. Dignes représentants de la MOD SQUAD (double référence à une série TV et à leur statut, M.O.D. pour Merchant Of Death), Maria Bello et David Koechner (acolyte survolté de Will Ferell dans Anchorman) peinent à se démarquer malgré des rôles taillés sur mesure, et si la sainte trinité qu'ils forment avec Aaron Eckhart (industries du tabac, de l'alcool et des armes) a tout de la bonne idée, elle ne culminera qu'à l'occasion de courtes scènes clés.

 

Résumé

Thank you for smoking apparaît autant comme une satire oscillant entre critique facile et plus pertinente, que comme un véhicule pour acteurs dans des contre emplois savoureux (enfin une bonne raison de détester Katie Holmes !) mais malheureusement sous exploités. Visant toujours juste, le film est une belle leçon d'immoralité reposant essentiellement sur la tchatche de son acteur principal dont les répliques sont amenées à devenir cultes. Thank you for smoking et surtout Thank you for watching !

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