Selma : Critique

Simon Riaux | 10 mars 2015 - MAJ : 07/06/2020 14:05
Simon Riaux | 10 mars 2015 - MAJ : 07/06/2020 14:05

Considéré comme le grand absent des Oscars 2015, Selma a déclenché outre-Atlantique une polémique d’ampleur au sujet de la fameuse Académie, accusée d’être peu représentative et conservatrice, car composée en grande majorité de mâles blancs ayant dépassé la soixantaine. Quelques semaines plus tard, voici venir le film qui retrace la lutte pour les droits civiques menée par Martin Luther King en 1965.

Et il est bien difficile de comprendre ce qui aura motivé pareil emballement médiatique, tant le film se révèle anodin et banal, toujours sur le point de sombrer dans une embarrassante médiocrité. S’il n’y avait un évident savoir-faire dans la gestion du récit, de son rythme et de ses différentes étapes, ainsi qu’une portée historique et mémorielle indéniable, on serait tenté de voir dans les cris d’orfraie poussés par certains un opportunisme de très mauvais goût.

Selma a pour lui de rappeler des éléments essentiels de la lutte du Dr. King, d’en réveiller certains symboles. On saura ainsi gré au film de rendre assez lisible pour un public qui n’en serait pas familier les enjeux sociologiques et législatifs de la célèbre marche de Selma, de rappeler quels étaient les mécanismes basiques de la ségrégation civique qui oppressait les citoyens noirs américains.

 

 

Le reste, hélas, ne présente pas le moindre intérêt. Rythme amorphe, esthétique de téléfilm opulent, le film d’Ava DuVerney manque cruellement de style. Ainsi, comme paralysé par le respect dû aux figures historiques invoquées, le scénario se refuse à toute dramatisation de l’icône Luther King. Le film, en s’ouvrant sur sa réception du Prix Nobel de la Paix, le sanctifie trop tôt, le transforme instantanément en symbole de pureté morale et humaine absolue, auquel il est parfaitement impossible de s’identifier.

Plus grave, le film ramène la question de la lutte pour les droits civiques à un affrontement benêt entre individus bons, et individus mauvais. Comme si un système étatique d’oppression et de ségrégation raciale ne tenait finalement qu’à la mauvaise volonté de quelques méchants et à l’indécision d’hommes de bien qu’il suffirait de convaincre.

 

 

Affiche officielle

Résumé

Transformant un combat collectif en une somme d’actes héroïques individuels, Selma donne une vision non seulement idéalisée, mais tristement simpliste et trompeuse d’un évènement matriciel de l’actuelle identité Américaine.

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