Le Roi Arthur, Dracula, Hercule... ces personnages cultes qu'on devrait laisser tranquille

La Rédaction | 16 mai 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
La Rédaction | 16 mai 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

On les aime, mais svp arrêtez avec eux.

Quelques années après un énième Robin des Bois modernisé qui s'est vautré, dans le sillage d'un Roi Arthur : La légende d'Excalibur qui avait été un four colossal, la même question se pose, sans cesse : pourquoi continuer à explorer, recycler, user ces personnages cultes ? Dracula, Hercule et Tarzan (qui vont revenir chez Disney), Sherlock Holmes dont la petite sœur aura droit à sa propre saga sur Netflix... la machine ne s'arrête pas.

Petite sélection de ces icônes qui devraient sûrement être mieux traitées, ou juste laissées de côté quelques temps.

 

photo, Max BoublilRobin du bois de Boulogne

 

DRACULA

D'où ça vient ? Du roman de Bram Stoker, publié en 1897, qui raconte les mésaventures de Jonathan Harker, jeune clerc de notaire anglais, qui se rend en Transylvanie pour faire affaires avec le Comte Dracula. Pas de bol, c’est un vampire, et sa fiancée lui plait beaucoup.
 
Ce que ça a donné : Une multitude de suites, de variations, de préquels, de films, de livres, de séries, de jeux vidéo, de comics. Dracula est devenu un personnage iconique, à tel point que son inspiration réelle, Vlad Tepes, est revenue dans les mémoires en dépit de ses qualités d’empaleur, et que son château est une attraction touristique en Roumanie.
 
 

photo bela lugosiEternel Bela Lugosi

 

Si l’on considère que la première adaptation au cinéma remonte en 1921 avec Drakula Halala de Karoly Lajthay, le comte n’arrive pas sous les feux des projecteurs puisque c’est une adaptation non-officielle. Tout comme le Nosferatu de F.W. Murnau en 1922. Il faudra attendre 1931 et le Dracula de Tod Browning, produit par Universal, pour que le vampire ne s’installe définitivement dans les salles obscures.

Et, à partir de là, les choses s’accélèrent. Des suites, des spin-offs humoristiques (Deux Nigauds contre Frankenstein), Bela Lugosi qui pète les plombs et est enterré dans son costume : Dracula perce l’écran et s’épuise rapidement.

 

photoNosferatu

 

En 1958, il retrouve une nouvelle jeunesse en Angleterre avec le mythique Cauchemar de Dracula, avec Christopher Lee dans le rôle du comte, Terence Fisher à la réalisation et le studio Hammer à la barre. Beaucoup plus subversif que ses prédécesseurs, ce nouveau film sur Dracula mêle l’horreur à l’érotisme soft et se voit à nouveau décliné de nombreuses fois, avec ou sans Christopher Lee d’ailleurs. Un éternel recommencement qui épuise une fois de plus le personnage.

 

Photo DraculaMagnifique Gary Oldman

 

Après un petit retour en 1979 avec le Dracula de John Badham, il devra attendre 1992 et Dracula de Francis Ford Coppola pour revenir à la source de son identité. Si le film n’est pas parfait, il impressionne par ses qualités esthétiques, son casting (Gary Oldman forever) et se permet de rendre sa stature tragique au personnage, mêlant pour l’occasion le roman de Stoker et quelques éléments biographique du vrai Vlad Tepes.

Une histoire sans fin, qui continue avec une nouvelle version lancée par Netflix, avec Claes Bang.

 

photo, Luke EvansEt l'autre, là, Luke Evans

 

Le meilleur : Sans hésiter, le Dracula de Browning et Le Cauchemar de Dracula de Terence Fisher. Monuments gothiques très ancrés dans leurs époques respectives, ils proposent chacun une lecture passionnante du mythe qui a presque supplanté le roman original dans le coeur des fans.
 
Le pire : Là encore, il y a le choix. Citons, évidemment, Dracula Untold de Gary Shore, sorti en 2014 et avec Luke Evans dans le rôle du comte. Un prequel devant servir de base au Dark Universe d'Universal, répudié très vite. Sinon, Les Charlots contre Dracula de Jean-Pierre Desagnat, sorti en 1980, pas mal non plus dans le genre.
 
 

photo draculaLes Charlots contre Dracula

 

SHERLOCK

D'où ça vient ? De l’écrivain Sir Arthur Conan Doyle, qui a fait apparaitre le célèbre détective dans pas moins de quatre romans et 56 nouvelles de 1887 à la fin de sa vie. Le célèbre détective a tant charmé les foules que son auteur s'est vu condamné à continuer ses enquêtes alors qu’il en avait plutôt ras-le-bol.
 
Ce que ça a donné : Après la mort de son cher paternel en 1930, l’appétit vorace du public pour Sherlock Holmes a continué à se développer, et au fil du temps les aventures du détective ont été déclinées sur tous les supports possibles et imaginables. Un matériau tellement usé qu'il a vu la figure de Sherlock et de Watson évoluer dans pas moins de 260 films. On comprend donc pourquoi la liste d'oeuvres qui va suivre ne peut être exhaustive. 
 
 

photoBasil Rathbone et Nigel Bruce dans Le chien des Baskerville de Sydney Landfield

 

Parmi les nombreuses adaptations du célèbre détective, certaines ont su se démarquer. Les cinéphiles se souviendront de Basil Rathbone et Nigel Bruce qui ont incarné respectivement Sherlock Holmes et Docteur Watson dans 14 films, entre 1939 et 1946. L'héritage qu'ils ont laissé du Docteur Watson, devenu à la longue un peu nigaud, est souvent critiqué.

 

photoPeter Cushing recolorisé dans Le chien des Baskerville de Terence Fisher

 

La figure ascétique de Peter Cushing en Sherlock Holmes a participé au charisme froid qu'on lui connait aujourd'hui. On ne le retrouve pourtant que dans un seul film, Le Chien des Baskerville, produit par la Hammer en 1959 et réalisé par Terence Fisher

D'autres grands noms se sont prêtés au jeu de l'interprétation du locataire du 221B Baker Street. Parmi les plus célèbres : Roger MooreNicol Williamson et Michael Caine
 
 

Photo Robert Downey Jr., Jude LawHolmes et Watson fantasmés par Guy Ritchie

 
Le nouveau millénaire n'échappe pas non plus à ses réinterprétations. Robert Downey Jr. a ainsi incarné Sherlock Holmes dans deux films de Guy Ritchie, avec pour cher Watson Jude Law. Adapté du comic book Sherlock Holmes de Lionel Wigram par la Warner, Sherlock Holmes et Sherlock Holmes : Jeu d'ombres proposent une version moderne et bohémienne du détective.
 
Guy Ritchie la veut viscérale et intellectuelle, et hache l'action dans un montage nerveuxSherlock Holmes 3 est censé arriver un jour.
 

 

photoGros casting

 
C'est entre la production du premier et du second volet au cinéma qu'une adaptation qui fait consensus aujourd’hui voit le jour : la série Sherlock de Steven Moffat et Mark Gatiss. L’enjeu était de rétablir quelques vérités un peu ternies par le temps. Leur but : réhabiliter la part d'ombre du personnage et l'importance de Watson. Entre arrogance, attrait pour les drogues et quasi-incapacité à avoir une vie sociale normale, Sherlock a vite séduit le public, pour devenir un véritable phénomène.  
 
Benedict Cumberbatch y donne la réplique au célèbre hobbit Martin Freeman dans une version fraîche et revigorante, où l'ennemie juré de Sherlock, Jim Moriarty, est planté par un Andrew Scott lubrique et imprévisible. 
 
 

photo, Andrew ScottAndrew Scott est Jim Moriarty 

Le meilleur : Indubitablement la série Sherlock, pour la musique de son générique, son format efficace de mini-série, ultra mini (3 épisodes par saison) qui laisse tout le loisir à ses créateurs de soigner les détails de l’écriture et de la mise en scène, en balayant au passage toutes les idées reçues.
 
Le pire : Mr. Holmes de Bill Condon (2016). Avec ce film, exit Baker Street et Docteur Watson, exit le grand Serlock Holmes détective privé. Le personnage n’est plus que l’ombre de lui-même, un vieillard retiré dans une maison de la campagne anglaise, à qui il ne lui reste de son ancienne vie que des souvenirs. Une adaptation oubliable, oubliée, qui n'a rien de l'essence du personnage de Conan Doyle. 
 
 Photo Mr. Holmes
 Ian McKellen, un Sherlock vieillissant

 

LE ROI ARTHUR

D'où ça vient ? Une mythologie connue de tous, apparue pour la première fois au 6e siècle, reprise et réinterprétée tout au long du Moyen Âge et jusqu'à nos jours, servant souvent les intérêts politiques et sociaux de chaque époque. Qui ne connait pas Excalibur, l’épée magique chasseuse des ténèbres, la Table ronde, les chevaliers, la quête du Graal, la vibrante tension du triangle amoureux formé par Guenièvre, le Roi Arthur et Lancelot sans parler de la mystérieuse forêt de Brocéliande ? 
 
Ce que ça a donné : Un matériau de base tellement lointain, tellement réinterprétré depuis la version développée par Chrétien de Troyes (1170-1185) qu'il est devenu entièrement malléable. Sujet à pléthore d'interprétations, d’anachronismes, de bizarreries, d’ajouts de détails (souvent pour le meilleur et parfois pour le pire), mystiques ou historiques : nombre d'adaptations visuelles de la légende se poussent aux portillons. 
 
 

photoDouceur noix de coco

 

La première adaptation cinématographique du cycle arthurien met en scène un Moyen Âge resplendissant et résonnant au son des joutes de chevaliers en armures polychromées. Les Chevaliers de la table ronde, réalisé par Richard Thorpe en 1953, est un témoignage des gigantesques productions hollywoodiennes.

Magnifiant la légende, ce film est devenu emblématique puisqu’il est un des premiers à être tourné au format large CinémaScope, en témoigne le générique d’introduction très subtil et ses magnifiques rideaux rouges qui ouvrent le cadre de la caméra. Toute l'imagerie d'un Moyen Âge fantasmé et whasé par les années 50 est là. Des côtes de mailles rutilantes aux robes brodées d'or des dames, des dents parfaitement blanches aux habits repassés et colorés, en passant par la vision lissée du chevalier toujours impeccable, même en plein combat, le film est un véritable témoignage des codes du cinéma des années 50.

 

photoLes Chevaliers de la Table ronde

 

Si Les Chevaliers de la table ronde de Richard Thorpe propose une imagerie extrêmement datée et dénuée de toute magie, la version de David FranzoniLe Roi Arthur, réintroduit un gimmick célèbre avec sa bande-annonce et le sous-texte de son affiche originale : Le Roi Arthur et ses chers chevaliers, ainsi que Marianne et Merlin, seraient en fait des personnages historiques.

Sorti en 2004, Le Roi Arthur avec Keira Knightley, Clive Owen et Ioan Gruffudd use et abuse de cet argument à des fins marketing. Pourtant le résultat n'est pas au rendez-vous et le box-office américain est catastrophique (51 millions de dollars à domicile pour un budget de 120).

Une politique assez absurde quand on voit à quel point le film baigne dans le mysticisme. Mais le véritable problème réside peut-être plus dans le fait que Clive Owen s’en va combattre un bon millier de saxons avec cinq champions, son épée et une Marianne archée... haute en couleurs.

Chef d'oeuvre d'originalité ou long-métrage incompris, Le Roi Arthur demeure un des plus grands classiques de la mythologie arthurienne au cinéma.

 

photoKeira Knightley en Marianne aux côtés du Roi Arthur de Clive Owen

 

Les enfants que nous avons été se souviennent forcément du Disney Merlin l'enchanteur. Sorti en 1964, il met en scène un Arthur tout mini, Roi de Bretagne en devenir en plein apprentissage auprès de l’enchanteur. Si le dessin-animé se clot au moment où Arthur retire l’épée du rocher, donc au moment où la légende commence, il permet à Wolfgang Reitherman (son réalisateur) de faire toute une série de blagues plus ou moins sympas, mais qui ne manqueront pas de ravir les enfants.

 

photo"Higitus Figitus"

 

Mais la légende du Roi Arthur et de sa Table ronde a aussi souvent été exploitée à des fins comiques. Qui ne s'est pas écroulé de rire devant l'une des plus fameuses versions du Roi Arthur : Monty Python, sacré Graal, chef d'oeuvre d'humour que l'on le doit à Terry Jones et Terry Gilliam ?

Un film qui puise sa force dans l'humour décalé et incroyablement loufoque des Monty Python. Dans cette comédie (qui est aussi leur premier long-métrage), la troupe livre des scènes à mourir de rire, à l'image de l'ouverture où Arthur et ses chevaliers arrivent à chev... à noix de coco. Succession d'images réelles et d'animations, dialogues entre-coupés d'apartés, inclusions chorégraphiques, Monty Python, sacré Graal c'est tout un programme.

 

photoUn monstre à trois têtes bien fameux

 

Qui parle du Roi Arthur ne peut évidemment se passer d'évoquer Kaamelott. La série française d'Alexandre Astier a bercé nos écrans de télévision de son générique entêtant et de sa bande de pignoufs mal décrottés, de 2005 à 2009

Alexandre Astier réussit à faire parler la légende par la bouche de parfaits abrutis sans jamais la tourner en ridicule. Extrêmement bien référencée, Kaamelott réussit à amuser par ses joutes verbales tout en rappelant les faits importants de la légende : le mysticisme de la légende, sa reprise par l’Église et le mystère autour du Graal (qui rappelons-le faisait référence à la base à un plat à poisson). Kaamelott a le mérite incroyable de ne pas insulter la légende et respirer le Moyen Âge, de même que Monty Python, sacré Graal, et son ton sacrément décalé.

Presque le même titre mais un tout autre ton pour Camelot, série annulée après une saison avec Jamie Campbell Bower en Arthur, Eva Green en Morgan et Joseph Fiennes en Merlin.

 

Photo Alexandre Astier* son du générique * taadaam, taadaam, taadaam

 

À côté de ça, la version de Guy Ritchie (ô boy...) est un véritable massacre. Le Roi Arthur : La Légende d'Excalibur, sorti en 2017, plante un Arthur et sa bande au sein de la résistance dans un pays en proie aux déferlements des forces du mal. À bas le mythe d'Arthur, exit le clan Pendragon, aux oubliettes les chevaliers légendaires... Montage mi-nerveux mi-ralenti, modernisation des looks qui ne veut rien dire et qui tente de se racheter à coup d'explosions et de boules de feu : le film fait mal.

Ce blockbuster a été un flop monumental : 175 millions de dollars dépensés (hors marketing) pour 39 millions encaissés à domicile et 148 à l’international.

 

Photo Charlie HunnamNo Way

 
Le meilleur : La version totalement hallucinée, kitsch et illuminée du rayon vert de John Boorman, Excalibur de 1981. Le réalisateur fait courir sa fascination pour la légende arthurienne tout au long du film dans une ambiance romantique dopée aux psychotropes. Boorman se permet même de distiller des thématiques écologiques avec la forêt d'Émeraude, thèmes très importants au sortir de la guerre du Vietnam et qui résonnent fortement aujourd'hui.
 
 

photoSUBLIME !

 

Le pire : On l'aura compris, en souverain de l'ignominie, Le Roi Arthur : La Légende d'Excalibur de Guy Ritchie. Mais il faut bien avouer que toute une veine d'adaptation est à mettre au placard. La légende arthurienne a nourri le cinéma SF et sa célèbre thématique du voyage dans le temps comme dans Un Cosmonaute chez le Roi Arthur de Russ Mayberry. La figure du bon roi au service des valeurs chevaleresques s'efface derrière celle d'un cosmonaute, personnage salvateur venu accidentellement du futur et qui finira par guider tous les péquenauds du Moyen Âge sur la voie du rêve américain.
 
 

photoÇa va, on s'amuse bien avec la légende ?

 

TARZAN

D'où ça vient ? Du cerveau du génial Edgar Rice Burroughs, père de John Carter et surtout Tarzan au tout début du XXe siècle. Fils d’aristocrates anglais débarqués en pleine jungle après une mutinerie, le futur Tarzan est recueilli à leur mort par un troupeau de grands singes. Ils appartiennent à l’espèce des manganis, totalement fictive, qui pourrait faire office de chaînon manquant entre l’hominidé et les gorilles.
 

Il prendra pour femme Jane Porter, avec qui il rentrera réclamer son titre en Angleterre. Il retournera en Afrique avec elle pour retrouver son fils, Korak-le-Tueur, parti redécouvrir ses racines dans la jungle. Au cours d’aventures de plus en plus exotiques et délirantes, la famille explorera moult cités perdues et lieux fantasmagoriques.

 
 
Ce que ça a donné : Vaste sujet, le personnage ayant été adapté plus d’une cinquantaine de fois, au cinéma, en série, et en animation. Ce qui fait justement le sel de Tarzan, c’est qu’il nous renvoie à une représentation datée, très marquée par son époque et par le darwinisme social. À travers cette figure, c’est celle d’un surhomme, maîtrisant la nature environnante, les autochtones et son milieu d’origine qui se dessine.
 
Ce point de départ aura été nuancé et transformé au fil des adaptations. L’incarnation la plus proche des romans originaux est bien sûr celle de Johnny Weissmuller, interprète initiale (et durant 12 films) du héros. Il inventera son cri, et fixera dans l'inconscient collectif le caractère comme l'apparence du personnage.

 

photo, Casper Van Dien Casper Van Kitsch

 

On se souvient également des trois saisons à succès de la série Tarzan où officiait Wolf Larson au début des années 90. Si plus grand monde ne se rappelle de Casper Van Dien dans le rôle, Tarzan et la cité perdue ressuscitait, malgré lui, le charme des pulps d’antan, avec une kitscherie amusante. Mais malgré ses gags lourdauds, c’est peut-être George de la jungle qui aura le mieux capturé ses dilemmes, ainsi que le décalage du personnage avec notre époque.

 

photo, Christophe Lambert Lambert dans la brume

 
Le meilleur : Greystoke, la légende de Tarzan de Hugh Hudson demeure à ce jour (et de très loin) la plus fabuleuse adaptation du mythe. Le film en épouse tous les grands ingrédients, ne recule devant aucune de ses complexités, et y accole un magnifique questionnement sur l’identité et la déshumanisation progressive de la civilisation occidentale.
 
Le pire : Tarzan de David Yates, est un objet de sidération. D’une part, il consacre l’échec actuel d’un système de production ayant recours au tout numérique plutôt qu’aux effets physiques ; mais il souligne avec cruauté l’incapacité de David Yates, principal artisan des adaptations de Harry Potter, à raconter correctement quoi que ce soit.
 
 

Alexander SkarsgårdHarry Potter a pris un peu de créatine

 

FRANKENSTEIN

D'où ça vient ? Du roman de Mary Shelley, publié en 1818, qui raconte comment le docteur Victor Frankenstein donne vie à une créature composée de morceaux de cadavres. Effrayé par sa création, il l'abandonne, sans se douter qu'elle se vengera.
 
Ce que ça a donné : Des tonnes d'adaptations plus ou moins fidèles et officielles, sous à peu près toutes les formes possibles (cinéma, séries, théâtre, BD, opéra). C'est d'ailleurs de manière quasi ininterrompue que le roman a nourri et inspiré des oeuvres depuis plus d'un siècle.
 
Si la première adaptation date de 1910 avec le court-métrage muet de J. Searle Dawley, c'est bien le Frankenstein de 1931 réalisé par James Whale, avec Boris Karloff, qui a marqué les mémoires. Un classique du genre, encore considéré comme une réussite flamboyante, et qui est l'un des piliers des Universal Monsters aux côtés de Dracula, la Momie et quelques autres.
 
 
photo, Boris KarloffImage mythique de Frankenstein, avec Boris Karloff
 
 
Il établira de nombreux codes autour de ce personnage mythique, et donnera une suite, La Fiancée de Frankenstein, là encore considérée comme un chef d'oeuvre du genre. Des libertés commencent à être prises avec le roman, mais avec un amour évident du matériau puisque Shelley elle-même a un rôle dans le prologue.
 
Hier comme aujourd'hui, le succès monte à la tête d'Universal : de nombreuses suites sont lancées (Le Fils de Frankenstein, Le Spectre de Frankenstein), tandis que la créature apparaît à droite à gauche dans l'univers (Frankenstein rencontre le loup-garouLa Maison de DraculaLa Maison de Frankenstein, Deux Nigauds contre Frankenstein), avec d'autres acteurs derrière le masque et jusqu'à lasser le public.
 
 

Photo Boris Karloff, Elsa Lanchester Elsa Lanchester, inoubliable fiancée

 

Lorsque le roman tombe dans le domaine public, c'est une aubaine pour le studio Hammer. Arrive ainsi Frankenstein s'est échappé en 1957, où  Terence Fisher redonne vie aux personnages avec Peter Cushing en docteur et Christopher Lee en créature. La Hammer exploite le matériau sur six suites plus ou moins mémorables, qui exploitent le potentiel horrifique et sanglant de l'histoire. Avant de, là encore, s'éteindre après usure de la marque.

Frankenstein inspire de tous les côtés, avec des variations italiennes étonnantes (Les Orgies de Frankenstein 80Lady Frankenstein, cette obsédée sexuelle), une version Factory de Paul Morrissey (Chair pour Frankenstein avec Udo Kier, présenté comme Andy Warhol's Frankenstein), un film avec Sting (La Promise), Frankenstein Junior de Mel Brooks, ou encore l'inévitable Frankenhooker (où un homme recompose sa petite amie tuée par une tondeuse, avec des morceaux de prostituées).

 

photoChair pour Frankenstein

 

Le mythe retrouve un peu de noblesse en 1994 lorsque Kenneth Branagh en tire une nouvelle adaptation. Le réalisateur incarne le docteur, tandis que Robert De Niro incarne sa créature. Avec en plus Francis Ford Coppola à la production et Frank Darabont en co-scénariste, c'est ce que beaucoup considèrent comme l'adaptation la plus fidèle. A défaut d'être la plus marquante.

Depuis, le roman de Mary Shelley a inspiré tout et n'importe quoi. Alvin et les Chipmunks rencontrent Frankenstein, Hugh Jackman le croise dans Van Helsing, Tim Burton ressort sa version mélancolique dans Frankenweenie ; il devient une sorte de super-héros musclé dans I, Frankenstein, a droit à un lissage moderne parfaitement insignifiant dans Docteur Frankenstein avec Daniel Radcliffe et James McAvoy, et continue de hanter la saga Hôtel Transylvanie. Il a aussi inspiré le petit écran, de Supernatural à Penny Dreadful en passant par Once Upon a Time.

Universal a tenté de lui redonner vie avec le Dark Universe, que La Momie avec Tom Cruise devait lancer. Une nouvelle version de La Fiancée de Frankenstein était annoncée, avec Javier Bardem en créature et Angelina Jolie en possible fiancée, le tout mis en scène par Bill Condon. Mais l'échec de La Momie a freiné les plans, qui semblent avoir été purement et simplement enterrés. 

Récemment, Elle Fanning a incarné Mary Shelley dans un film consacré à l'artiste.

 

photo, Robert De Niro Robert De Niro en Créature

 
Le meilleur : Dans la tonne de versions et libertés prises, difficile de ne pas considérer Frankenstein et La Fiancée de Frankenstein comme les références absolues, même près de 90 ans après. Côté série, Penny Dreadful a été une belle surprise.
 
Le pire : Il y a le choix, mais I, Frankenstein et Docteur Frankenstein sont certainement parmi les plus ordinaires et fades. Même Van Helsing de Stephen Sommers est plus amusant dans son genre.
 
 

photo, Aaron Eckhart Frankenbadass

 

HERCULE

D'où ça vient ? De la mythologie grecque, où il s’appelle Héraclès. Fils de Zeus et de la mortelle Alcmène, il bénéficie d’une force incroyable et parcourt le monde pour y accomplir d’incroyables exploits (les plus célèbres étant ses Douze Travaux) avant de se suicider en demandant à son fils Hyllos de lui construire un bûcher sur le Mont Oeta. Ambiance.
 
Ce que ça a donné : Un cas un peu particulier cet Hercule, puisque du haut de sa stature mythique, il a toujours été là. Depuis des millénaires, et sous des formes différentes d’ailleurs. Il se retrouve dans plus ou moins toutes les cultures, a hanté toutes les formes d’art (poèmes, littérature, théâtre, sculpture et peinture) et l’industrialisation du divertissement au siècle dernier lui a permis de rester dans les mémoires.
 
 

AfficheSteve Reeves, Hercule incontournable

 

Etrangement, il n’est pas arrivé au cinéma tout de suite, même si sa première apparition sur un écran de cinéma remonte à 1918, dans le Hercule de Febo Mari. Il faudra cependant attendre la fin des années 50 pour qu’il investisse les salles obscures. C’est l’Italie qui lui donne sa chance avec Les Travaux d'Hercule de Pietro Francisci, en 1958, dans un pays alors en pleine fièvre du péplum. Une popularité qui ne faiblira pas puisqu’on le retrouvera soit en héros, soit en guest dans une multitude d’œuvres, son visage le plus connu restant celui de Steve Reeves.

 

photo Arnold SchwarzeneggerHercule à New-York

 

Les Etats-Unis s’en emparent bien entendu et là, il sort un peu de son cadre puisqu’il est mis quasiment à toutes les sauces, du véhicule pour Arnold Schwarzenegger (Hercule à New York) en passant par un guest dans Jason et les Argonautes, le dessin animé (le Hercule de Disney) ou, bien entendu, la série télé (Hercule produit par Sam Raimi, qui a donné lieu ensuite à Xena, la guerrière et la série Hercule contre Arès avec Ryan Gosling).

Dans les années 2000, il fait un retour en force grâce à deux films : La Légende d'Hercule de Renny Harlin et le Hercule de Brett Ratner avec Dwayne Johnson.

 

photo HerculeUn Hercule en mode OSEF

 
Le meilleur : Il y en a tellement, et tous construits sur le même modèle, que c'est un peu difficile. Mais choisissons Les Travaux d'Hercule, oeuvre séminale de la "hercsploitation" ne serait-ce que parce qu'elle nous a offert Steve Reeves. Et puis, on ne peut s'empêcher d'aimer le Hercule de Disney, complètement cintré.
 
Le pire : L'évidence voudrait que l'on choisisse le Hercule à New-York d'Arthur Allan Seidelman et on ne va pas se gêner. On ne peut pas non plus faire l'impasse sur les deux films les plus récents et la série de Sam Raimi, difficilement regardable aujourd'hui.
 
 

photo Hercule contre ArèsRyan Gosling, à gauche

 

VIDOCQ 

D'où ça vient ? De la réalité. Eugène-François Vidocq est né en 1775, et est devenu célèbre comme aventurier-voleur-détective. Après s'être évadé du bagne, il a rejoint les forces de police, d'abord officieusement, afin de nettoyer Paris. Il a publié ses mémoires en 1828, contribuant à forger son propre mythe.
 
Ce que ça a donné : Vidocq a d'abord inspiré de nombreux écrivains, dont Balzac, Dumas et Victor Hugo. Le personnage de bagnard devenu justicier fascine, et nourrit bien des univers. Il devient héros de cinéma pour la première fois en 1909, dans un court-métrage. A peu près chaque décennie en donnera une version par la suite, jusqu'à devenir le héros de la série Vidocq en 1967, sous les traits de Bernard Noël. Dès 1971, Claude Brasseur prend la relève dans Les Nouvelles aventures de Vidocq.
 
En 2001, après quelques décennies plus discrètes, le personnage passe dans l'ère moderne avec la superproduction Vidocq de Pitof, avec Gérard Depardieu et Guillaume Canet. Présenté comme le premier film tourné intégralement en numérique, il devait bouleverser le paysage. Il a finalement été un échec à bien des niveaux.
 
Apparu dans plusieurs BD et même dans le jeu vidéo Assassin's Creed Unity, ainsi que dans une nouvelle série en 2010 avec Bruno Madinier, Vidocq est revenu dans L'Empereur de Paris, interprété par Vincent Cassel. Une nouvelle superproduction française, réalisée par Jean-François Richet.
 
 

photo, Vincent Cassel Cassel en Vidocq

 
Le meilleur : Difficile de vraiment saluer une adaptation, même si Les Nouvelles aventures de Vidocq a une place dans le coeur de bien des Français.
 
Le pire : Vidocq de Pitof ayant au mieux l'audace d'essayer de révolutionner le cinéma, en prenant de gros risques, il ne mérite pas d'être encore une fois rabaissé. En revanche, L'Empereur de Paris est particulièrement fade et dispensable, avec ses grands airs de gros divertissement populaire.
 
 

photoLe souvenir tenace de Pitof

 

ROBIN DES BOIS

D'où ça vient ? Personnage de fiction, au centre de plusieurs chansons de gestes et récits de barde, sa légende se cristallisera au tournant du XVe siècle. Il s’agit initialement d’un brigand, dissimulé par sa capuche, qui vole les riches pour donner aux pauvres, et s’assure de retourner l’impôt aux taxés. Une attitude qui lui vaut la sympathie et la complicité des habitants du bois de Sherwood, dont une partie devient ses complices, formant « Les Joyeux compagnons de Robin des Bois ».
 
 
photo, Douglas FairbanksDouglas Fairbanks
 
Ce que ça a donné : Chaque époque a porté un regard différent sur ce héros extrêmement politique, puisqu’il vise directement les puissants et affirme la légitimité de l’action violente émanant du peuple. Le maccarthysme l’avait bien compris et a interdit le personnage, retiré des bibliothèques publiques pour cause de « propagande communiste ».
 

Le héros intéresse rapidement le cinéma, puisqu’il aura droit à une première aventure filmique dès 1908, avec Robin Hood and His Merry Men. Mais le « premier » Robin des Bois à marquer le public sera Douglas Fairbanks, qui inventera presque de toute pièce la figure du héros aventurier au cinéma.

Nous sommes en 1922, et cette version capture si parfaitement un genre naissant qu’il en deviendra le premier film hollywoodien à avoir une première publique et médiatique. Il faudra attendre 1938 et Errol Flynn pour que le héros monte encore en puissance. Flynn illumine Les Aventures de Robin des bois de charisme et ses séquences d’action demeurent aujourd’hui encore des classiques du genre.

 

photoErrol Flynn

 

C’est dans les années 70 qu’on trouve deux autres adaptations géniales : celle de Disney et celle de Richard Lester. Toutes deux sont parmi les plus fines et politiques qu’ait connu le personnage. La première est un dessin animé où sous les airs sympatoches et rigolards de l’ensemble, se dissimule une critique radicale du pouvoir et de la faiblesse des puissants.

Le second, intitulé La Rose et la flèche, rassemble Sean Connery et Audrey Hepburn. Sous ses airs romantiques, il chronique l’engagement tardif d’un soldat pour une terre et des principes, la dernière bataille d’un combattant rentré chez lui pour mourir.

Enfin, s’il n’est ni le plus réussi, ni le plus fou, ni le plus divertissant, le Robin des Bois : Prince des Voleurs avec Kevin Costner demeure une des versions les plus attachantes.

 

photo Sean Connery et Audrey Hepburn

 
Le meilleur : Sacré Robin des bois de Mel Brooks. Le réalisateur parvient à embrasser cette figure légendaire, et à la mêler à son sens incroyable de la parodie. Parfait, hilarant, inoxydable.
 
 

photo, Cary ElwesRobin des LOL

 
Le pire : Indéniablement le Robin des Bois d'Otto Bathurst. Mais pour aller au-delà, le Robin des Bois de Ridley Scott est un film terriblement mutilé. Pas mauvais, mais complètement à côté de ses pompes. Originellement pensé pour traiter de la figure du shérif de Nottingham, il deviendra un film classique sur Robin. D’où un non-sens total pour un projet qui souhaitait interroger la formation politique de l’Angleterre et proposer un récit ultra-réaliste, obligé de se plier à un mythe... fictif.
 
Et s'il ne s'agit pas d'un film entier, rappelons que le personnage tel que campé par Franck Dubosc dans le comiquement nullissime Cinéman demeure un des plus gros crachats adressé à l'histoire du cinéma et au héros. Pensée émue également pour Max Boublil dans Robin des Bois - La véritable histoire.
 

 

Affiche

 

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commentaires
Jean Neige
18/05/2020 à 16:52

Sacré Robin des bois !! Culte

Pat Rick
18/05/2020 à 10:25

Pour le roi Arthur et la saga du Graal si un réalisateur pouvait créer une série ou un film du niveau d'Excalibur de Boorman ce serait génial mais les miracles sont rares.

zidus
17/05/2020 à 21:31

Bonsoir,
Super article de fond.
Comme toujours ou presque oserais-je dire.
Un grand merci pour vos articles et votre site qui ont accompli la gageure de me réconcilier définitivement avec tout un pan de la pop culture et de me réapproprier une partie de ma propre (et pop!) culture. Bref, merci!
Une remarque toutefois : Dans le paragraphe consacré à Frankenstein, j'ai été surpris par l'absence, remarquable, du Frankenstein Junior de Mel Brooks. Alors même que vous évoquez son Sacré Robin des Bois un peu plus loin dans le chapitre dédié au voleur légendaire. Simple oubli ou bien choix délibéré..? Certes il faut faire des choix, vous ne pouvez pas tout citer mais il me semblait que le Frankenstein (merci de prononcer Frankenstiiiiiine au passage :) ) du sieur Brooks était largement considéré comme une référence en matière d'adaptation comique? Peut-être me trompes-je?
Longue vie à EL, grand merci à toute l'équipe!

Petipo
17/05/2020 à 10:49

Détail de taille oublié pour Dracula :
https://www.youtube.com/watch?v=nV7caPeKQdE

Petipo
17/05/2020 à 10:31

Super dossier ! Vivement une deuxième partie : il vous reste un paquet de figures à explorer.

Shuppy
17/05/2020 à 08:54

Un dossier Tarzan sans le film avec Bo Derek n'est pas un bon dossier Tarzan

Marvelleux
16/05/2020 à 23:45

Bon article. Je pensais aussi à Zorro.

Abibak
16/05/2020 à 22:22

Quand on me parle l'hercule je pense systématiquement à la série.
Elle a fait découvrir la mythologie grec à toute une génération.

Marv
16/05/2020 à 18:45

Super dossier je kiff

alulu
16/05/2020 à 16:57

Bonne rétrospective, il y a quelque films que je ne connaissais pas. Mais ce qui me dérange c'est votre façon d'aborder ce dossier du genre "il serait temps de laisser ces icônes tranquille". Même si c'est plus un questionnement que de donner le "la", ça fait un peut Jupiter dans la manière.

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