First Love : pourquoi le cinéma de Takashi Miike est si génialement dément ?

La Rédaction | 20 décembre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
La Rédaction | 20 décembre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Un boxeur malade, une call-girl en fuite, plein de came, des yakuzas, des guns et des sabres. Voilà la recette que nous tambouille Takashi Miike, artiste prolixe avec déjà plus de 100 films au compteur. Mais au fait, pourquoi son cinéma est-il si euphorisant et puissant ?

  

 

TROP, C’EST PAS ASSEZ

On reconnaît d’abord un film de Takashi Miike à son sens tout particulier de l’excès. Jamais gratuit ou insincère, son style le pousse à prendre son temps comme on étire un élastique, à truffer son récit de détails qui empèsent parfois un peu le rythme, mais vont justifier un basculement total, une prise de risque aussi invraisemblable que démente. Découvert par beaucoup de spectateurs français avec sa trilogie Dead or alive, Miike paraissait déjà aussi jusqu’au-boutiste que frappadingue.

 

photoUn héros qui va se révéler bien punchy comme il faut

 

C’était sans compter sur Audition (dont on vous causait pour Halloween), qui fit halluciner une bonne partie de ses spectateurs lors d’une interminable séquence oscillant entre comédie de mœurs et torture porn pas loin d’être insoutenable. Et l’anti-héroïne sanglante du film illustre à ce titre parfaitement ce grand principe du réalisateur. Ainsi, la femme interprétée par Eihi Shiina est indiscutablement victime d’une arnaque, mais sa réaction, pour terrifiante et jubilatoire qu’elle soit, dépasse l’entendement.

Ce genre de sursaut narratif qui métamorphose le film et son projet de départ sont monnaie courante chez le cinéaste, et on en retrouve comparable au cœur de son dernier long-métrage, First Love. On ne va évidemment pas spoiler comment Miike fait pour passer soudain du drame social passablement glauque à une romance criminelle épique, mais une nouvelle fois, l’artiste se plaît à secouer son récit comme un prunier, pour en sous-tirer un fruit nouveau.

 

photo, Sakurako Konishi, Masataka KubotaUn duo épatant

 

TOUT EST BON DANS LE GENRE

Le cinéma de Miike sera passé par le thriller, le film d’action, le drame romantique, le fantastique, l’horreur, le film historique, le chambara… C’est bien simple, il n’est pas un genre que l’artiste n’ait pas exploré. La conséquence directe de cette invraisemblable palette, c’est que Takashi Miike connaît le langage de l’image sur le bout des doigts, peut-être plus finement encore qu’un Tarantino.

Et c’est ce dont First Love témoigne avec éclat. Qui dit bascule de ton en cours de film dit rupture de ton. Ce qui marque dans ce nouvel opus du réalisateur, c’est combien le récit mute, sans soubresauts inutiles. Cette très impressionnante fluidité vient sans doute de l’expérience unique acquise par le réalisateur. Ainsi, First Love se métamorphose soudain en authentique histoire d’amour, avant que cette dernière ne se propose de se sceller dans une cascade de sang et de tripes.

 

photoUn petit sashimi de Yakuzas ?

 

MORT AU CYNISME

Cette mue excitante se veut aussi une déclaration d’amour à tous les types de cinéma, pourvus qu’ils soient pourvoyeurs d’émotions. Et ce sont bien ces dernières qui apparaissent éclatantes dans First Love, Miike prouvant une nouvelle fois qu’il sait tirer de la puissance de n’importe quel type de récit. De son ouverture aux airs de drame social bouleversant, le cinéaste ne tire jamais une posture, pas plus qu’il n’embraye sur une folle turbine à viande pour le plaisir d’être goguenard.

Ces éléments parfaitement maîtrisés ne sont jamais des digressions, mais d’authentiques plongées, immersion dans des styles, des aspirations, qui se nourrissent mutuellement plutôt que de se parasiter. Cet élan multiple et toujours sincère façonne finalement une romance puissante, gorgée de la folie qui l’entoure et la précède.

Les habitués de Takashi Miike se rappelleront que ce merveilleux fou furieux avait tout de même réussi à narrer Zebraman 2 : Attack on Zebra City en y installant de véritables personnages, ne sacrifiant jamais la folie à l’émotion. Bien sûr, First Love est situé dans un monde beaucoup plus en phase avec le nôtre, mais la folie n’en est pas moins communicative, l’enthousiasme dévorant, et le magnétisme palpable.

 

Affiche frCeci est un article publié dans le cadre d'un partenariat. Mais c'est quoi un partenariat Ecran Large ?

Tout savoir sur First Love, le Dernier Yakuza

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commentaires
Emric K
21/12/2019 à 07:31

@loc Tout à fait d'accord ! Takashi miike est certes très productif mais a dans sa filmographie de sacrées perles, films cultes dont Visitor Q ou encore Gozu qui sont incroyables, indigestes pour d'autres. On peut aussi rajouter son Django avec Tarantino et son Cameo dans Hostel.

MystereK
20/12/2019 à 15:17

Je ne suis pas object, j'adore Miike, mais ce film est vraiment bien et différents de ces derniers, comme il nous l'a dit avant la projection : un film calme, une hstoire d'amour, sans violence, sans têtes coupées, un drame intimsite profond (si si, c'est ce qu'il nous a dit). On ne s'y ennuie pas une seconde et c'est moins délirant que d'habitude.

Sinon, si sa filmographie est inégale, il a fait largement plus que 2 ou 3 bons films, beaucoups sont cité par LOC et j'en ai aiméà pas mal d'autres, dont les Moles Song.

Loc
20/12/2019 à 14:34

Certes le cinéma de Takashi Miike est inégal, mais il a fait largement plus d'un bon film sur 30. Il ne faut pas exagérer, même si chacun a ses goûts. Audition, City of the lost souls, Bird people in China, Harakiri (même si ce remake n"est pas aussi fort que le classique de Kobayashi), 13 assassins, Visitor Q, Les prisonniers du paradis, Ley lines, Rainy dog, Shinjuku triad society, Gozu, Dead or alive 1 et 2 (le 3 est un peu en deçà), The happiness of the katakuris, Shield of straw, Lesson of the evil, Ichi the killer et son épisode de Master of horror La maison des sévices, sont pour la plupart de bons voire d'excellents films.
Je dirai que la moitié de sa filmographie vaut le coup d'oeil, voire parfois plus.
Par rapport à la soi-disant lenteur de son cinéma, je ne trouve pas. Oui parfois il prend son temps, comme dans pas mal de films japonais, mais cela n'en fait pas pour autant de mauvais films. Ce first love a l'air intriguant et il bénéficie de bonnes critiques en général : je pense aller le voir !!

Simon Riaux
20/12/2019 à 14:29

@sylvinception

Oui enfin Miike, on ne perd jamais une occasion d'en parler.
Et First Love, on a commencé à en dire du bien dès Cannes, soit des mois avant qu'il ne soit possible ou envisageable d'être partenaires du film.

C'est cet intérêt qui motive son existence, et non l'inverse.

sylvinception
20/12/2019 à 14:26

@Constantine : "Ceci est un article publié dans le cadre d'un partenariat."
Qu'est-ce que t'as pas capté ?? ;-)

Constantine
20/12/2019 à 13:56

Vraiment le cinéma de Miike est génial ? Vous êtes trop drôle....Le mec fait un film correct sur 30....il a 2 ou 3 bons films dans sa filmographie ( souvent lent quand même...et une pléthore de grosses daubes) mais c’est tout . Aucun talent notable pour la mise en scène , aucun sens du rythme..Il ne suffit pas du faire du WTF pour être intéressant.