Le réalisateur Xavier Dolan critique à son tour Netflix, Amazon et les plateformes de streaming

Christophe Foltzer | 22 mai 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Christophe Foltzer | 22 mai 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Quand on se sent en danger, on a deux possibilités, fuir ou se défendre. Mais quand on est le cinéma traditionnel, la fuite n'est pas une option.

Et c'est vrai que les temps changent et que c'est un peu chaud pour le cinéma en ce moment. On ne parle pas de cinéma en tant qu'industrie, qui se porte à merveille grâce à Disney notamment, mais de cinéma en tant que support artistique qui tire clairement la tronche depuis plusieurs années.

A l'image de la société humaine où la middle-class disparait de plus en plus, les films à moyen budget connaissent de plus en plus de difficultés à se monter.

 

Photo The RevenantInarritu, contre vents et marées

 

En cause, la politique des studios, qui visent avant tout de grosses franchises bien chères dont le retour sur investissement est quasiment assuré avant le premier jour de tournage, ou des tout petits films qui ne présentent aucun risques financiers. En parallèle, Netflix, Amazon et consorts se sont développés et ont récupéré cette catégorie de films sacrifiés au point que l'industrie commence à flipper sur cette mort annoncée du cinéma exploitée en salles.

Si de nombreuses voix se lèvent dans les deux camps, Festival de Cannes oblige, le sujet est plus que sensible actuellement. Si Alejandro González Iñárritu avait plus ou moins pris la défense des plateformes il y a quelques jours en reconnaissant notamment qu'elles jouaient le rôle de bouc-émissaire, c'est au tour du réalisateur Xavier Dolan, dont le film Matthias & Maxime est en compétition, de donner son avis. On peut dire qu'il ne va pas dans le même sens, comme l'a prouvé son intervention sur le plateau de l'émission Stupéfiant ! sur France 2 :

 

photo, Xavier DolanXavier Dolan, "romantique traditionaliste" (c'est lui qui le dit)

 

"Autour de moi, je sens que le marché s'est métamorphosé et que les gens préfèrent vivre le plaisir des films de façon individuelle et casanière plutôt que de se retrouver dans un espace socialement avec les autres. C'est dommage..."

On ne lui jettera pas la pierre, pour une fois, tant effectivement l'expérience cinématographique se vit en salles et en communauté pour en accéder à toute sa beauté. Mais, évidemment, le réalisateur de Mommy étant un jeune homme de son époque, il est aussi client des plateformes SVoD comme Netflix. Sauf, qu'il ne les apprécie pas pour autant :

 

Photo Xavier DolanMatthias & Maxime, son nouveau film présenté à Cannes

 

"Moi aussi j'ai Netflix. Mais il faut que les deux puissent coexister. L'un ne peut pas remplacer l'autre. Le digital, c'est la platitude. Ça manque de relief, ça manque de texture, ça manque de vie ! Sur ces plateformes, on crée une multitude de contenus qui sont extrêmement chiants et mauvais. Il y a quelque chose d'aseptisé qui correspond aussi à la mentalité et à la nature de ces plateformes."

 

PhotoSeul dans la nuit ?

 

Incroyable mais vrai, nous nous retrouvons totalement dans ces propos. Attention, toutefois, à ne pas tout mélanger. Nous ne critiquons pas Netflix en soi, qui propose tout un tas de contenus différents et intéressants mais il faut bien reconnaitre que cela pousse à une certaine normalisation de la production, une nomenclature qui montre de plus en plus ses limites.

En fait, on serait assez pour faire se rejoindre les points de vue de Dolan et d'Inarritu : le problème ne vient ni de la plateforme, ni de la technologie, mais bel et bien des décideurs et des studios. Si le cinéma était encore capable de prendre autant de risques qu'avant, nous n'aurions même pas cette conversation.

Le nouveau film de Xavier DolanMatthias & Maxime, est présenté ce mercredi au festival de Cannes. Sa date de sortie française n'est pas encore connue.

 

photo Netflix

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commentaires
CG
24/05/2019 à 21:36

Je suis cinéphile, je vois + 500 films par an dont + 150 en salles, mais une fois sur trois, faut faire taire des impolis ou changer de place à cause de personnes qui se croient toutes seules. L'autre jour, un monsieur qui sentait très mauvais s'est mis à un siège de moi alors que l'immense rangée était complément vide.
Et je ne parle pas de la programmation en VOST très anecdotique (dans ma ville).
L'offre cinéma de Netflix n'est pas idéale, mais quel bonheur de voir leurs films dans ma petite salle de cinema à la maison !!!

Maurice Escargot
24/05/2019 à 19:17

MacReady, le mec qui n'a rien d'autre à faire que de jouer les justiciers de la syntaxe pour s'ériger en parole de valeur...
Encore un web-warrior bien pathétique.

MacReady
24/05/2019 à 09:55

@Maurice Escargot

Rires.
Je reprenais ta syntaxe "faut vraiment arrêter avec ça..."
Ils n'arrêteront pas malgré ta plainte, et je m'en fous que t'arrêtes pas non plus. Tant que t'as conscience que ça marche dans les deux sens.

Maurice Escargot
23/05/2019 à 21:01

@MacReady : non je n'arrêterais puisque comme plusieurs autres, c'est ce que je vis. Désolé si ça te dérange, mais c'est un fait : pour beaucoup, quel que soit le film (mon exemple d'un "vieux" film en VO est d'ailleurs assez significatif), le ciné devient une plaie.
Rester chez moi me permet d'éviter les incivilités et pour me couper des possibles bruits environnants, j'utilise un casque de qualité qui de plus retranscrit très bien les effets sonores. La concentration est donc totale, à l'inverse d'une salle de ciné, du moins dans 90% des cas. J'aimerais que ce soit l'inverse, mais ce n'est pas le cas, hélas.
Donc non, désolé, je n'arrêterais pas.

MacReady
23/05/2019 à 17:56

@Opale

Et d'autres commentaires vont aussi dans mon sens (parfois) pour dire que des salles de ciné normales, ça existe. Même si aujourd'hui globalement on a une opinion commune qui taille les salles et soutient Netflix et cette nouvelle manière de voir.

Je ne suis pas avocat je m'en fous de défendre ou donner des points. Je trouve juste facile d'opposer les séances remplies de gens bruyants à un salon cool et calme. Parce qu'à ce sujet du coup, qui a les moyens d'avoir un vrai système de son, un écran de qualité, un appart bien isolé sans bruit des voisins, sans bruit d'une nationale ? Tout le monde n'a pas internet, la fibre, etc.
Et qui peut nier qu'il est nettement plus facile de rester concentré et coupé du monde dans une salle, plutôt que chez toi où tu peux aller chercher ton verre d'eau, aller pisser, mettre en pause 5 et couper les films ?

Bref, je trouve que comme d'hab ces débats méritent de pas être sur une seule ligne commune, d'où mon commentaire.

Opale
23/05/2019 à 17:49

@MacReady tu a bien de la chance d'avoir autour de toi des salles de ciné où le public est respectueux des autres et du film. Ce n'est pas le cas de beaucoup de monde, plusieurs commentaires vont dans ce sens et ce n'est pas agressif ni haineux de dire ça: aller au ciné devient problématique à cause d'une partie du public qui se croit dans son salon... Et tout le monde n'a pas une pléthore de salles à sa dispo, surtout en province. Du coup, entre aller voir des films "pas facile d'accès" pour éviter d'être dérangé et me faire chier car ce n'est pas mon style de ciné ou mater Netflix tranquille à la maison mon choix est fait...

Cinégood
23/05/2019 à 12:10

Comment ne pas voir une bonne grosse lèche au jury et aux organisateurs du festival ?

Netflix n'est pas une révolution, c'est noté plus ni moins qu'un vidéoclub sans sortir de chez soi.

Les vidéoclubs ont ils tué le cinéma ? Non. Bien au contraire, ils ont permis de découvrir des films que le public n'aurait jamais pu voir.

WalterB
23/05/2019 à 12:03

C'est la pire défense du cinéma en tant qu'expérience en salle. Les incivilités étant pléthores, les soucis techniques communs, on pourrait bien se plaindre du prix du billet aussi. Mais oui, il est évident que l'expérience en salle reste du domaine de l'impressionnant, sacralise l'œuvre par les dimensions de son affichage, et par l'immersion que procurent l'obscurité et la résonnance du lieu.
Cependant Dolan balance le pire mensonge qui soit en abordant une séance comme un moment de communion autour d'une œuvre. Chaque personne présente dans la salle n'est pas là dans cette optique et au contraire, cherche à reproduire son confort personnel sans être dérangé par autrui.

Enfin, il se permet de critiquer le catalogue Netflix (bien d'accord avec lui), bon il omet certaines alternatives plus poussées sur la cinéphilie et le principe d'éclectisme en art, de découverte. Mais surtout c'est se mordre la queue que de critiquer Netflix qui suit la même logique pour bien des œuvres que les grands studios hollywoodiens (et les prods européennes dans une certaine mesure).

Ronnie
23/05/2019 à 09:59

"plutôt que de se retrouver dans un espace socialement avec les autres. C'est dommage..." entre les ados qui crient / parlent fort, les mecs immenses ou les meufs à chignon qui se mettent juste devant toi pour te cacher la moitié de l'écran, le mecs a coté qui squat tout l'accoudoir, celui qui respire comme un boeuf tout le film, celui qui vient se coller alors que la salle est vide, celui qui te met des coups dans ton siège..
Certes c'est pas tout le temps mais au prix de la seance quand ca arrive c'est hyper relou !

bijo
22/05/2019 à 23:45

Le partage, la communion, ça ne veut rien dire pour moi. Si communion il y a, c'est entre l'écran et moi, le reste je m'en contrefiche royalement. La communion c'est parfait dans un stade mais dans un cinéma, je ne vois pas l’intérêt. Après je ne dis pas sur une séance spéciale sur un film qui a une hype et qui a ces aficionados......Pourquoi pas.

@gege, +1

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