En Avant : la Russie censure le prochain Pixar à cause d'un personnage ouvertement homosexuel

Marion Barlet | 3 mars 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Marion Barlet | 3 mars 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Alors que Disney met l'extrémité d'un orteil dans la représentation gay au cinéma, c'est déjà trop pour certains pays, et En avant est passé à la moulinette de la bienséance russe.

Le débat s'est vraiment installé après la sortie de La Reine des neiges en 2013. Disney a-t-il représenté l'homosexualité dans son film d'animation à travers le personnage principal d'Elsa ? Celle-ci aurait eu des comportements dits "louches" par les personnes qui l'ont pointée du doigt : pas d'attirance pour la gent masculine et des propos d'émancipation dans sa chanson Let it go/ Libérée, délivrée, interprétée par la communauté LGBT, mais aussi leurs détracteurs comme une invitation au coming-out.

 

photoLibérée, délivrée

 

Quelques optimistes ont cru que La Reine des neiges 2 ferait la part belle à cette dimension, mais Disney n' a pas validé l'hypothèse et a laissé l'héroïne à sa solitude, qu'elle chérit d'ailleurs. L'exemple d'Elsa a permis de raviver la question de la représentation gay sur nos écrans : pourquoi si peu de personnages homosexuels dans un monde où les différentes orientations sont flagrantes ? Pourquoi tant de réserves des distributeurs concernant le jeune public ? Pourquoi tenir sous silence une réalité ? De nombreuses voix se sont élevées dans la communauté LGBT+ et dans les rangs progressistes en faveur d'une plus grande diversité dans les récits cinématographiques.

 

photoL'amour entre un renne et un bonhomme de neige, on en parle ?

 

D'un autre côté, il y a eu les détracteurs, qui ont estimé que montrer aux jeunes enfants des personnages gay pourrait les inciter à le devenir eux-mêmes. Ainsi au Brésil, la ministre conservatrice Damares Alves a accusé La Reine des neiges de rendre les fillettes homosexuelles (comme quoi, on entend des conneries en France, mais aussi ailleurs).

Plus récemment, c'est le baiser dans Star Wars : L'Ascension de Skywalker qui a fait l'objet de controverses. À la fin du film, on aperçoit de façon fugace la Commandante d'Acy embrasser sa compagne. Singapour et Dubai ont mis le holà, ainsi que les Émirats arabes unis qui ont demandé la suppression de la scène. Les distributeurs de Singapour ont notamment accepté la suppression du passage afin de ne pas voir le film classé R (interdit aux moins de 17 ans non accompagnés), ce qui aurait "nui aux audiences" selon eux. 

 

Photo Noémie Merlant, Adèle HaenelPortrait de la jeune fille en feu : romance lesbienne

 

La Chine cependant n'a pas demandé le retrait de la scène, à l'inverse de la compagnie américaine Delta Airlines, qui propose les versions censurées de plusieurs films dans certaines zones de vol. Ainsi, Booksmart et Rocketman ont été vidés de leur (substantique) moelle homosexuelle, et l'on se demande si quiconque peut être dupe de ce qui se trame vraiment.

Le débat revient désormais sur le prochain Disney/Pixar, dans lequel se trouve un personnage ouvertement homosexuel. Un garçon qui joue à la poupée, une fille aux cheveux (trop) courts, string à paillettes, BO de Julia Lanoë ? Qu'est-ce qui fait tant frissonner les distributeurs russes dans En avant ? Réponse : le personnage secondaire de l'Officier Specter (Lena Waithe), une cyclope qui déclare avoir une "petite amie". Le terme a été modifié par "partenaire" dans la traduction russe afin d'enlever toute orientation sexuelle et ici homosexuelle.

 

photoLe Secret de Brokeback Mountain : secret de polichinelle

 

Un petit changement qui en dit long sur l'acceptation encore trop faible de l'orientation sexuelle de tout un chacun dans le monde et notamment dans l'éducation des enfants. Rien de très illogique de la part de la Russie cela dit dans un contexte particulièrement hostile à la communauté gay dans le pays.

Alors que le mariage gay est légalisé partout aux États-Unis depuis 2015 et en France depuis 2013, Vladimir Poutine a proposé d'inscrire dans la constitution russe, l'interdiction du mariage gay. Par ailleurs, le sujet reste sensible et déchaîne les passions au point de rendre frileuses de grandes entreprises de divertissements à l'image de Disney. Une simple phrase déclarative draine plus qu'une information, il s'agit d'idéologie pour certains et d'émancipation et de logique réaliste pour d'autres.

Sur le sujet, on retrouvera prochainement Mulan, icône queer de Disney, ainsi que d'autres héros et héroïnes qui mériteraient d'être sortis du placard. En avant sort ce mercredi 4 mars en salles en France.

 

Affiche française

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commentaires
Flo
04/03/2020 à 13:38

...disons aussi que c'est une question de respect envers l'actrice Lena Waithe, pas obligée ici de jouer un personnage qui ne serait pas en accord avec ses propres préférences.

Tonto
03/03/2020 à 21:03

C'est marrant, parce que, pour le coup, les studios Pixar sont à ma connaissance ceux qui s'y prennent le mieux : en glissant juste une phrase anodine au milieu d'un film qui parle de totalement autre chose, c'est juste une manière de représenter la société, sans juger, ni en bien, ni en mal.
En plus, tout le reste du film devrait quand même largement contenter les conservateurs : le rôle central de la figure paternelle dans la construction de son identité, l'ode à la famille "traditionnelle" (comme dans tous les Pixar), l'importance du passé pour créer un présent et un avenir plus justes, la critique de l'urbanisation et de la mondialisation qui privent le monde de son âme et de son idéal...
Franchement, si ce film ne plaît pas à Poutine, je sais pas ce qu'il lui faut !

Cela dit, foncez tous voir ce film qui, au lieu de diviser, a tout pour unifier ! Un potentiel émotionnel malheureusement pas exploité à fond, mais par ailleurs, un road trip magnifique bourré d'humour (hilarant) et de beaux sentiments (mais rien de gnangnan). Du Pixar très équilibré !

Micju
03/03/2020 à 21:00

L’hyper violence pas de problème. Des meurtres à tous les 5 minutes non plus. Mais un homosexuel. Alors là non. Putain que le monde me décourage. L’amour ne dérange aucunement les enfants. On a juste à leur expliquer que cette différence existe depuis la nuit des temps. Et que l’important c’est de se sentir bien et voilà.

Camenbert
03/03/2020 à 18:50

@Albert

Le concept de "promotion de l'homosexualité" étant déjà un raisonnement profondément homophobe, pas besoin de la propagande de qui que ce soit pour rappeler que si la russie n'est pas le diable, en matière de droit des homosexuels, c'est un pays arriéré, aux politiques d'oppression infectes.

Luigi
03/03/2020 à 18:11

Je me marre! Beaucoup de personnes sont vraiment déconnecté d'une certaine réalité de la société "multiculturelle"!vous savez que même un petit baiser chaste entre hétéros, c'est tabou dans beaucoup de communautés? Vous avez déjà vu un mariage musulman ,gitan? On ne se becote pas en public !

rocco l'asticot
03/03/2020 à 15:58

Magnifique tous ces pays d'arriérés qui font les prudes devant des représentations gay tout ce qu'il y a plus de naturel et qui débarque par pack de 30 dans les grands hôtel parisiens pour déféquer leur dernier repas sur tout ce que compte la capital d'Escort Girl...
Dommage que les grands studios fassent passer le pognon avant les convictions, paracerqu' un petit blocus culturel leur ferait le plus grand bien.

Tom Ward
03/03/2020 à 15:24

@Raiden :

1) Dans ce cas-là on enlève toutes les romances entre filles et garçons aussi, puisque tu considères qu'être amoureux ne concerne pas les enfants. Ou alors ce sont les amours homos en particulier dont tu penses qu'elles ne devraient se déclarer qu'à partir d'un certain âge, comparé aux amours hétéros, qui elles concernent les enfants sans problème ?

2) C'est un film tout public, donc il n'y a pas de "cet âge-là" qui tienne. D'autant que les enfants sont très intelligents (parfois bien plus que certains adultes...) et ouverts d'esprit, si tant est qu'on les éduque correctement.

3) Dans un monde idéal, l'homosexualité serait banalisée aux yeux des enfants justement. Un enfant qui voit papa et maman se faire un bisou peut très bien voir deux hommes ou deux femmes s'en faire un aussi, je ne vois pas en quoi ça le choquerait plus ou moins.

Ohoh!
03/03/2020 à 15:14

Quelle absurdité que de penser que l'amour pourrait choquer les enfants !
Ce raisonnement est seulement révélateur de la propre incompréhension des parents hétérosexuels.

Flo
03/03/2020 à 15:03

Vu que ce n'est pas asséné de manière brusque, et que c'est une référence ultra secondaire, ça ne fera de "mal" à aucun enfant...
Parano "d'adultes" exagéré, comme d'hab.

Madolic
03/03/2020 à 13:45

@ecranlarge votre bot de régulation il fait de l'excès de zèle sans déc
Surtout que le mot n'était ni une insulte ni quoi que ce soit de choquant

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