Batman : Last Knight on Earth - critique qui n'aime pas les adieux

Arnold Petit | 15 juin 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Arnold Petit | 15 juin 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Avec Batman : Last Knight on Earth, publié sur le Black Label de DC de juillet 2019 à février 2020 aux États-Unis et disponible depuis le 5 juin chez Urban Comics en France, Scott Snyder et Greg Capullo mettent fin à leur saga autour de Batman au cours d’une ultime croisade dans laquelle le Chevalier Noir parcourt un monde désertique, où tout espoir a disparu.

ATTENTION : SPOILERS

BATMAN FOREVER

Dès ses débuts chez DC en 2011, avec Sombre Reflet et Les Portes de Gotham, Scott Snyder s'est jalousement emparé de la mythologie de Batman et n'a jamais pu l'abandonner. Désigné pour reprendre la série Batman en compagnie du dessinateur Greg Capullo au moment où l'univers de DC entamait sa renaissance, le scénariste a su s'approprier l'histoire du personnage et la bouleverser de façon radicale, avec l'introduction de La Cour des Hiboux, la réinvention de ses origines dans L'An Zéro, sa disparition dans Mascarade ou encore avec Jim Gordon reprenant le costume du héros dans La Relève.

Déterminé à laisser une trace impérissable dans la vie de Batman, il a même trouvé le moyen de le rendre immortel en imaginant une histoire dans laquelle une machine crée un clone de Bruce Wayne tous les 27 ans et lui implante les souvenirs de l’original.

 

photoBatman : Origins

 

Après All-Star Batman, le scénariste a poussé son obsession pour le Chevalier Noir encore plus loin et s'est à nouveau associé à Greg Capullo pour le placer au centre d'un récit cosmique complètement épique, Batman : Metal, avec un multivers noir dans lequel se trouve des versions alternatives du Chevalier Noir ainsi qu’un nouvel ennemi, Le Batman Qui Rit. Une fusion sadique et monstrueuse entre Batman et le Joker qui a eu le droit à son propre titre et qu'on retrouvera dans la suite de Metal, Death Metal, prévue pour juin aux États-Unis.

The Last Knight on Earth est la conclusion de tout ce que Scott Snyder et Greg Capullo ont accompli autour de Batman. Leur chant du cygne pour ce héros dont ils ont déterminé le destin pendant près d'une décennie et qui a eu un rôle prépondérant dans leurs carrières respectives. Néanmoins, même s’ils se permettent plusieurs références à leurs précédentes œuvres, il n'est pas nécessaire d'avoir suivi leur travail pour apprécier cette dernière croisade.

 

photoCe n'est qu'un au revoir

 

INFERNO

The Last Knight on Earth démarre de manière personnelle et symbolique dès les premières pages, tandis que Batman suit une mystérieuse piste qui l’amène jusqu’à Crime Alley, la rue où ses parents sont morts, devant le corps inanimé d'un petit garçon. Surpris par un coup de feu, Bruce Wayne se réveille à l'asile d'Arkham, dans une camisole de force, attaché à un lit face à Alfred qui lui raconte que Batman et ses ennemis ne sont que le fruit d'un délire psychotique.

Cette scène d’ouverture, qui rappelle le Moon Knight de Jeff Lemire et Greg Smallwood, avec un héros enfermé dans un hôpital psychiatrique, incapable de discerner le vrai du faux, n’est en fait qu’une illusion destinée à cacher un cauchemar encore pire. Un vieil Alfred révèle à Bruce qu’il n'est qu'un clone du véritable Bruce Wayne et que le monde qu’il a connu n’est plus qu’une Terre désolée, dirigée par un certain Omega, qui s'est installé dans ce qui reste de Gotham City.

 

photoBatman : Fury Road

 

Même s’il ressemble à Old Man Logan de Mark Millar et Steve McNiven, avec un Chevalier Noir parcourant les ruines de l’univers de DC, le scénario se rapproche également de l’Enfer de Dante. À mesure qu’il avance en quête de son Paradis, avec la tête du Joker en guise de Virgil, Batman s’enfonce dans un monde de plus en plus étrange et obscur, où se trouve des versions damnées de Barry Allen, Wally West, Jay Garrick et Bart Allen, condamnés à errer sans fin, ou encore un Lex Luthor essayant désespérément de faire revenir Superman.

 

photoUne vision d'horreur après l'autre

 

Pour le crayon de Greg Capullo, qui a travaillé sur Spawn aux côtés de Todd McFarlane, l’enfer n’a quasiment plus de secret et le dessinateur délivre des visuels percutants, emplis de violence et de noirceur. Avec un sens du détail à chaque trait, aussi bien dans les visages que dans les décors, il varie les genres en même temps que les environnements et impressionne par sa maîtrise dans l’asile d’Arkham, pendant la bataille de Fort Waller ou lorsque Batman voit les morts prendre forme sous ses yeux lors d'une magnifique scène qui évoque la traversée du Styx.

Des illustrations sublimées par les couleurs vibrantes et éclatantes de FCO Plascencia et l'encrage de Jonathan Glapion, qui renforcent cette ambiance aussi oppressante que surréaliste. 

 

photoBatman et Wonder Woman dans les limbes

 

WHO KILLED THE WORLD ?

The Last Knight on Earth tire clairement son inspiration de Mad Max et ne se cache pas pour faire des références directes à l’œuvre de George Miller, aussi bien dans son esthétique que dans son intrigue. Alors que Batman reprend la réplique de Fury Road et demande « qui a tué le monde », Wonder Woman lui donne la réponse : l’humanité.

Découragés par le discours prophétique de Lex Luthor à propos du changement climatique, du manque de ressources et des inégalités sociales, les gens ont cédé à la peur et se sont tournés de leur plein gré vers l'Apocalypse, en se jetant sur le Hall de Justice et en massacrant les héros les uns après les autres.

 

photoLe récit de la fin du monde

 

Sous la plume de Scott Snyder, Gotham est devenu un personnage à part entière et Batman représente un symbole d’espoir et de bravoure, inspirant les habitants à ne pas plier face aux ennemis qui tentent de prendre le contrôle de la ville par la violence et la terreur. Ce voyage est donc l’occasion pour ce clone de Bruce Wayne de s’interroger sur le Chevalier Noir, son héritage et ce qu’il représente dans ce monde où plus personne ne veut être sauvé. Malheureusement, cette introspection s’efface progressivement pour laisser place à une intrigue complexe, qui manque de profondeur et mène à un dénouement prévisible et décevant.

Alors qu'il aurait été plus intéressant de s'intéresser à ce Bruce Wayne en quête d'identité, qui n'a plus que la tête du Joker pour seul véritable ami, le voyage de Batman se transforme en une énième quête épique pour sauver le monde. Après un passage par la nouvelle Cour des Hiboux, le héros se rend à Gotham City pour affronter Omega, un grand méchant dont l'identité ne fait plus aucun doute à mesure que le héros avance

 

photoUn méchant basique pour un combat épique

 

Même si elle est fidèle à l'image du Chevalier Noir que Scott Snyder a construite, la fin reste bâclée et va jusqu'à forcer le happy ending, avec un Joker reprenant le costume de Robin, même après torturé la Bat-family dans Le Deuil de la Famille ou relâché sa toxine sur la Ligue des Justiciers et les habitants de Gotham dans Mascarade.

Mais malgré ses défauts, inhérents à la plupart des scénarios de Scott Snyder, The Last Knight on Earth est quand même captivant jusqu’au bout. Si elle n’est pas aussi grandiose que The Dark Knight Returns de Frank Miller, cette dernière histoire n’en reste pas moins marquante, comme ce que Scott Snyder et Greg Capullo ont réalisé avec Batman depuis toutes ces années.

 

photo

Résumé

Batman : The Last Knight on Earth est une œuvre avec un potentiel incroyable, mais inexploité. Malgré des idées vraiment intéressantes autour du Chevalier Noir et ce qu’il incarne, le scénario de Scott Snyder se perd finalement pour pas grand-chose et n’arrive pas à la hauteur des superbes illustrations de Greg Capullo ou de ce que le duo a pu accomplir par le passé autour du personnage.

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commentaires
Flo
15/09/2020 à 18:15

Supers dessins au service d’un pseudo “Old Man Walking Logan”. Qui est en fait une preuve de plus que l’écriture en roue libre de Scott Snyder est le plus bel hommage aux comics DC d’antan, qui ne se gênaient pas eux aussi pour enchaîner les rebondissements tarabiscotés. Car ils n’oubliaient jamais d’être d’abord au service du Fun et… des bons sentiments.
Même le sort “expiatoire’ du Joker s’y justifie, pour ceux qui connaissent sa symbolique, et les liens intimes entre lui et le héros.

Flash
23/06/2020 à 19:21

je viens de finir ce bouquin et franchement, je n'ai pas accroché du tout , trop fouillis et au final peu passionnant. Je ne suis jamais rentré dans l'histoire.

RobinDeBois
17/06/2020 à 17:51

@Arnold j'espère que l'image m'a induite en erreur alors parce que sinon c'est un spoil en bonne et du forme !

@Numberz Je ne pourrais pas juger je n'ai lu que ces 3 tomes mais j'avoue que lorsque j'avais parcouru les suivants en librairies ils ne me tentaient pas plus que ça ^^ Mais là pour la conclusion je ne vais pas hésiter.

Arnold Petit - Rédaction
17/06/2020 à 13:08

@RobinDeBois L'identité d'Omega n'est pas dévoilée dans la critique, c'est bien la preuve qu'elle est attendue et prévisible.

Shayne
17/06/2020 à 11:17

Salut ! Snyder m'avait déçu sur Metal malgré quelques tres bonnes idées. Notamment la création des evil batmen et ce batman qui rit qui fait froid dans le dos ! Mais sur son titre justice league, il prend le temps de développer son intrigue correctement sur 5 tomes. Notamment les tomes 3 et 4 (les derniers sortis) sont aussi bons qu'a la période Geoff Johns. Son death metal fait peur, mais espérons qu'il a gagné en sagesse durant son run de justice league.

Numberz
16/06/2020 à 06:55

@robin

La cour des hiboux est un bon arc effectivement.
Mais comme dit placebo, après ça se gate. J'avais plein d'espoir au départ. Puis de l'espoir avec Rebirth, plus proche du pré Flashpoint que l'immonde post Flashpoint et la renaissance.
Johns en scénariste me manque. Tout comme Morrison sur DC. Même Bendis ma déçu.

RobinDeBois
16/06/2020 à 00:36

J'ai adoré la cours des hiboux et le deuil de la famille donc je vais logiquement acquérir ce tome là. Vous auriez quand même pu éviter de spoiler l'identité d'omega :/

"Surpris par un coup de feu, Bruce Wayne se réveille à l'asile d'Arkham, dans une camisole de force, attaché à un lit face à Alfred qui lui raconte que Batman et ses ennemis ne sont que le fruit d'un délire psychotique "

Ca m'a fait penser à l'excellent épisode de Buffy qui se base entièrement sur cette idée.

Placebo
15/06/2020 à 23:27

Le souci c'est que Snyder fait vendre... du coup la tête de DC ne voit pas bien plus loin que ça alors que c'est que Snyder c'est que du toujours plus gros que ça en devient risible.
Et le pire c'est que Snyder a un peu tout pouvoir pour influer la ligne directrice de la continuité maintenant que Johns s'est/est mis en retrait (ça fait un moment qu'il n'a plus la côte en interne a priori - cf. son projet rebirth complètement mis de côté au profit des métalleries justement).

Numberz
15/06/2020 à 18:46

@Phil

Complètement d'accord. Cappulo est vraiment bon. Mais snyder par vraiment trop en roue libre. Puis de toute façon, à la tête de DC y a plus que des businessmen. J'avais foi en John's, mais encore raté.

Phil06
15/06/2020 à 18:26

La serie Metal n’etait vraiment pas top. Le premier tome etait super mais les deux autres... un vrai supplice à lire tellement ça partait de tous les côtés pour finalement tourner en rond avec, en conclusion, une fin plate.
Snyder et Cappulonsont pourtant une bonne combinaison d’artiste mais Snyder part toujours en vrille depuis quelques années et ça en devient saoulant à force.

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