Hitcher : le film d'horreur pervers caché derrière la légendaire course-poursuite

Axelle Vacher | 9 mai 2024
Axelle Vacher | 9 mai 2024

En près de quarante après le flop de sa sortie, Hitcher s'est graduellement imposé comme un thriller culte à la croisée des perversions les plus terribles.

La nuit tombe sur la route 66, et la fatigue alourdit dangereusement les yeux d'un tout jeune C. Thomas Howell. Une rencontre manquée avec le pare-choc avant d'un poids lourd plus tard, le bougre passe la silhouette détrempée d'un autostoppeur et s'imagine naïvement qu'un compagnon de voyage lui permettra de troubler l'ennui et repousser les bras d'Orphée. « Ma mère m'a dit de ne jamais faire ça », s'exclame-t-il le sourire aux lèvres tandis qu'il ouvre sa portière à ce parfait inconnu.

Dans un monde idéal, Jim Halsey dépose son passager quelque part en chemin et roule sans encombre jusqu'en Californie. Mais dans le monde du scénariste Eric Red, Jim Halsey aurait mieux fait d'écouter les conseils avisés de sa petite maman chérie. Thriller pseudo horrifique et résolument pervers, ce premier long-métrage du photographe reconverti Robert Harmon propose un jeu du chat et de la souris entre un antagoniste sans motivations particulières, et un héros poussé dans ses retranchements les plus intimes.

 

Hitcher : photo, Rutger HauerMorale du film : maman a toujours raison

 

boulevard de la mort

C'est en écoutant le Riders on the storm des Doors que les prémisses du récit sont venues à Red. Sa vingt-troisième bougie soufflée depuis peu, l'apprenti scénariste quitte le paysage urbain de son Manhattan natal pour le Texas. Le périple s'étire, le vide succède aux immeubles tandis que la ligne d'horizon s'éloigne un peu plus au fil des kilomètres. Red exorcise alors son angoisse à grands coups de gribouillages et accouche en quelques mois d'un premier jet nerveux qu'il envoie dans la foulée à droite et à gauche.

Jugé trop gore, trop violent, trop pernicieux, The Hitcher a cependant requis un important travail de réécriture avant d'être considéré monnayable à Hollywood. Là, il passe entre les mains de multiples studios tels que Warner Bros, Universal Pictures ou encore 20th Century Fox, qui s'y rattache brièvement. Mais la finalité est la même : chacun se refourgue le projet comme une patate chaude. Au gré d'un heureux concours de circonstances, le scénario pique néanmoins l'intérêt du vice-président d'HBO, Maurice Singer, lequel lance promptement le film sur les rails. 

 

Hitcher : photo, Jennifer Jason LeighIl était aussi question d'un globe oculaire caché dans un hamburger

 

En 1986, le film investit donc les salles obscures. Mais en dépit d'une poignée de prix remportés au Festival du film policier de Cognac, il accuse un échec cuisant à domicile. Outre le flop commercial de l'entreprise (qui n'engrange que 5,8 millions de dollars pour un budget estimé à 6 millions), la critique semble se faire une joie d'assassiner le film. Le célèbre Roger Ebert se montre d'ailleurs particulièrement virulent dans sa rubrique du Chicago-Sun Times, qualifiant le produit fini de « malade et corrompu ». Aouch. 

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commentaires

12/05/2024 à 18:47

J'ai adorer !

Eomerkor
11/05/2024 à 11:43

Rutger Hauer montre dans Hitcher qu'un pouce levé peut être le signe de votre prochaine mort. A méditer quand on est un youtubeur et qu'on réclame des pouces bleues alors qu'on ne le mérite pas.
Excellent souvenir de ce film. Ca aurait pu être une série B mais c'est devenu un film culte. En personnage énigmatique puis psychopathe, Rutger Hauer montre qu'il est un acteur d'exception à l'aise avec les petites productions "dérangeantes" de Verhoeven et le monde hollywoodien. C'est peut-être aussi l'apogée pour C. Thomas Howell qui vait bien débuté avec E.T et Outsiders. Sa carrière n'a pas décolé après mais il est tout à fait convaincant. Quand à Jenifer Jason Lee qui avait déjà joué avec Rutger dans la Chair et le Sang, j'ai toujours beaucoup de plaisir à la revoir. Pour le reste la photo, la mise en scène, la tension croissante et un petit côté malsain font de Hitcher une grande réussite (ce qui l'a destiné a avoir droit à son remake sans intérêt).

Rh
10/05/2024 à 20:26

Ce film. J’avais eu la chance de le voir à l’Étrange Festival suivi d’une masterclass de Rugter Hauer. Un beau souvenir (avec Drive et Take Shelter, c’était un joli tiercé).


10/05/2024 à 20:18

Faut penser à vous relire, bisous

Birdy l'inquisiteur
10/05/2024 à 12:47

Merci Sanchez. Que ceux qui n'ont jamais pu gouter à ce film et savourer les joies de l'Enfer croupissent au Paradis. Ils ne savent pas ce qu'ils ratent.

Sanchez
10/05/2024 à 11:08

@birdy
Joli texte qui fait plaisir à lire

Birdy l'inquisiteur
10/05/2024 à 10:37

Je cherchais un film à me mettre sous la dent, et il était planqué au milieu des mes centaines de dvd, conseillé par un pote un jour, mais jamais lancé. Je tourne en rond devant les jaquettes, au point de perdre envie de mater un film. Et puis allez savoir pourquoi, je le choisis. Enfin. Ou peut être m'a t'il choisi, attendant son heure, ma fatigue, et une attirance coupable vers l'inconnu. Je le prends en stop.
Après 10 minutes, ma vie de cinéphile ne sera plus la même. j'ai sous les yeux l'exemple le plus brutal et évident d'une introduction parfaite, qui me fait perdre mes repères narratifs, et me laisse pantois devant le cynisme absolu d'un acteur déjà adoré pour (comme vous tous) Blade Runner.
Le film enchaine son nihilisme le plus sordide, n'hésite jamais à couper quand on voudrait voir, et à nous montrer quand on voudrait tourner la tête et ne plus penser à cette chevauchée avec le diable.
Depuis, il a retrouvé la poussière de son étagère, bien caché, espérant retomber dans l'oubli, refermant cette porte obscure qui m'appelle quand la fatigue l'emporte à nouveau. Il est de ces films uniques, frère de sang d'Alien, Massacre à la Tronçonneuse, The Thing, l'Exorciste, The Hauting, ou Psychose. Son poison n'a jamais vraiment disparu de mes veines, et parfois, cette porte qu'on voudrait garder fermée à jamais s'entrouvre et laisse passer son murmure : rejoins moi, tu aimes ça...

Sanchez
09/05/2024 à 22:58

Un chef d’œuvre , un des meilleurs films des années 80 totalement sous estimé. La scène de la garde à vue pompé dans thé Dark knight. Rutger Hauer au sommet de son art pour un des meilleurs psychopathe du cinéma. Mais aussi la cinegenie de C Thomas Howell, et un scénario sans concession (avec une motivation du tueur inédite m , il veut mourir) , et surtout la photo absolument incroyable de John Seal , c’est un œuvre d’art de la première à la dernière image.

De Vengeance Aveugle à Gangsterdam
09/05/2024 à 22:56

Je veux bien un article sur Vengeance Aveugle avec Rutger Hauer en as du sabre aveugle..
Une belle collection de rappel de films collector à mener
Avec Rutger également "le sang des héros". Ce mec était un immense acteur, dire que son dernier film est une pauvre apparition dans une comédie nanardesque française Gangsterdam..

Kyle Reese
09/05/2024 à 20:57

Je plussois, Hitcher grand moment de ciné et de tension pour cette série b implacable, traumatisante pour l'ados que j'étais à l'époque et avec toujours ce fond de mystère concernant ce tueur énigmatique. Une histoire simple mais pas un film simpliste. Le meilleurs rôle de Hauer avec celui de Roy Batty dans Blade Runner évidement.

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