Impitoyable : le film qui signa la fin flamboyante du western, par Clint Eastwood

Antoine Desrues | 20 juillet 2021
Antoine Desrues | 20 juillet 2021

Devant et derrière la caméra, Clint Eastwood a non seulement signé avec Impitoyable l'un de ses meilleurs films, mais aussi le western post-moderne ultime.

Un coucher de soleil. C'est sur cette image on ne peut plus logique et sublime que s'ouvre Impitoyable, annonçant déjà la manière qu'aura le film de délivrer le crépuscule d'un genre investi par son auteur depuis de nombreuses années. Si le western a souvent été considéré pour son lyrisme et son romantisme, le long-métrage de Clint Eastwood ne s'y accroche que dans ce plan inaugural, comme pour mieux marquer sa finalité.

À vrai dire, Impitoyable débute même par la fin. Pas celle de son récit, mais celle d'un autre film, hors champ, qui aurait eu toute sa place dans un western classique. Le cow-boy William Munny, après une vie de violence et de débauche, a fini par trouver sa rédemption en tombant amoureux d'une femme qui a réussi à le sortir de son addiction au whisky. Menant une vie paisible avec ses deux enfants, le couple a vécu une vie heureuse, jusqu'à ce premier plan, où l'on voit la silhouette de Munny enterrer celle qu'il a aimée.

 

photo, Clint EastwoodChassez le naturel...

 

La Belle et les bêtes

Ainsi, Impitoyable a le génie de se présenter comme un épilogue de deux heures, dans lequel Munny (brillamment incarné par Eastwood) accepte de s'associer avec un jeune cow-boy, surnommé le "Schofield Kid", pour une ultime prime. Dans la ville de Big Whiskey, deux hommes ont violemment tailladé une prostituée, Delilah, avant d'être libérés par le shérif de la ville, "Little Bill" Daggett, contre une amende dérisoire. Les collègues et amies de Delilah, dans un élan de colère et de solidarité, ont réuni pas moins de mille dollars pour ceux qui accepteront de tuer les deux criminels.

À partir de ce postulat résolument sombre et féministe, Impitoyable est mû par une magnifique sagesse, une maturité qui lui permet de prendre du recul avec l'iconographie du western, qui a pourtant fait les heures de gloire de Clint Eastwood depuis la série Rawhide. En même temps, il est intéressant de savoir que le scénario de David Webb Peoples a traîné dans les cartons d'Hollywood depuis au moins les années 80.

 

photoLa classe américaine

 

En effet, c'est grâce à une lectrice de la Warner Bros. qu'Eastwood a eu l'occasion de découvrir ce petit bijou, alors réservé à Francis Ford Coppola. Désireux tout de même de collaborer avec l'auteur, le cinéaste s'est finalement rendu compte que l'option émise par le réalisateur d'Apocalypse Now venait d'expirer, ce à quoi il a immédiatement réagi en réservant à son tour les droits sur le scénario. Malgré cela, il aura fallu dix ans de plus pour qu'il puisse enfin lancer la production de ce projet rêvé, soit le temps d'atteindre l'âge parfait pour lui-même incarner le rôle principal.

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commentaires
Hocine
25/07/2021 à 00:43

Impitoyable est un film essentiel dans la carrière de Clint Eastwood, sinon le meilleur, le plus abouti.
Il est arrivé à un moment où sa cote au box-office baissait sérieusement (voir les résultats décevants de La Dernière Cible, Pink Cadillac et La Relève) et où ses ambitions de réalisateur se précisaient (Bird, Chasseur Blanc Cœur Noir), même si elles étaient déjà évidentes plusieurs années auparavant (Un Frisson dans la Nuit, L’Homme des Hautes Plaines, Breezy, Josey Wales Hors-la-loi, Bronco Billy, Honkytonk Man, Pale Rider). En fait, avant Impitoyable, ses derniers succès commerciaux remontaient au milieu des années 80 (Sudden Impact, La Corde Raide, Pale Rider et Le Maître de Guerre).
À cette époque, de nouvelles vedettes du box-office émergèrent comme Tom Cruise ou Eddie Murphy. Au début des années 90, à Hollywood, on spéculait sur une possible évolution de carrière de Clint Eastwood, similaire à celles de Charles Bronson et de Burt Reynolds: d’authentiques stars dans les années 70, ils sont devenus des has-been à la fin des années 80. C’est dans ce contexte que Clint Eastwood décide de sortir le scénario d’Impitoyable de son tiroir. Écrit par David Webb Peoples, en étant influencé par le film Taxi Driver et son personnage principal, Travis Bickle, le scénario est d’abord acquis par Francis Ford Coppola. Lorsque son option expira, Clint Eastwood s’empresse d’acquérir les droits, au début des années 80.
D’après Clint, il préféra attendre d’avoir l’âge adéquat pour jouer le rôle de William Munny. C’est ainsi que le tournage d’Impitoyable démarre à l’automne 1991. Conscient qu’il y a plusieurs personnages importants, Clint décide d’engager des acteurs connus comme Gene Hackman, Morgan Freeman et Richard Harris. Ce qui est une rupture par rapport aux précédentes productions Malpaso, qui se contentaient, pour la plupart, d’acteurs peu connus pour tenir les seconds rôles. Autre rupture: le tournage d’Impitoyable dure un peu plus longtemps. Clint a pris plus de temps pour tourner les scènes et les perfectionner. Il sentait que ce serait peut-être son dernier western. En tout cas, le scénario était idéal pour un dernier western. Impitoyable semble être la synthèse et la conclusion de tous les westerns de Clint Eastwood. Lorsque le film sort aux Etats-Unis, à l’été 1992, il réalise le meilleur démarrage de la carrière de Clint Eastwood. En fin d’exploiration en salles, il franchit la barres des 100 millions de dollars. Les critiques n’avaient jamais été aussi bonnes pour un film de Clint.
Le film obtiendra 4 Oscars: Meilleur Film, Meilleur Réalisateur (Clint), Meilleur Second Rôle Masculin (Gene Hackman) et Meilleur Montage (Joel Cox). Clint a aussi été nominé pour l’Oscar du meilleur acteur mais c’est Al Pacino qui l’obtient pour Le Temps d’un Week-end.
Avec Impitoyable, Clint Eastwood est définitivement reconnu comme un cinéaste à part entière. Sa carrière est relancée: il enchaîne avec Dans la Ligne de Mire, Un Monde Parfait et Sur la Route de Madison. En 1993, il est de nouveau numéro 1 du box-office américain, après avoir été numéro 1 en 1972, 1973, 1983 et 1984.
Que dire du film Impitoyable ?
Un film qui est un véritable classique.
Il a été dédié à Sergio Leone et Don Siegel, deux réalisateurs qui ont été importants dans la carrière de Clint.
Un des rares films à avoir vraiment mérité l’Oscar du Meilleur Film. Les acteurs sont tous au diapason. Le thème musical principal est simple, beau et émouvant. Les personnages féminins sont au cœur du récit et vont littéralement démarrer l’action du film, contrairement à plusieurs autres westerns, même très bons.
Le titre original du film, Unforgiven, n’a vraiment d’équivalent en français.
On pourrait traduire Unforgiven par celui qui n’est pas pardonné ou ceux qui ne sont pas pardonnés.
Je le regarde toujours avec beaucoup de plaisir. Une version restaurée pour le vingt-cinquième anniversaire du film est sortie dans les salles françaises en 2017. Clint est venue la présenter au festival de Cannes, où il a également donné une masterclass, qui est disponible sur YouTube. Depuis Impitoyable, sorti il y a 29 ans maintenant, il n’y a pas eu de western aussi bon.
Impitoyable semble un peu oublié aujourd’hui, en dehors des cinéphiles et des fans de Clint Eastwood.

J’attends avec impatience son prochain film, Cry Macho, dont la bande-annonce ne devrait pas tarder à être dévoilée. Peut-être lors de la sortie de The Suicide Squad.

Difficile d’établir une liste définitive des meilleurs films réalisés par Clint mais je citerais Impitoyable, Josey Wales Hors-la-loi, Million Dollar Baby, Mystic River, Bird, Un Monde Parfait, Sur la Route de Madison, Honkytonk Man, Lettres d’Iwo Jima, L’Homme des Hautes Plaines, Gran Torino, Pale Rider, Bronco Billy, L’Echange, La Mule, American Sniper, Mémoires de nos Pères, Un Frisson dans la Nuit, Breezy, Chasseur Blanc Coeur Noir, Richard Jewell, Sully.

PP
21/07/2021 à 09:24

Magnifique mais je pense pas que ce soit le dernier du genre HOSTILE est assez balaise dans le genre western crépusculaire

Francis Bacon
20/07/2021 à 23:12

@Faurefrc
Le bon, la brute et le truand est un film de S. Leone.

Impitoyable est un pur chef d'œuvre, magnifique, avec des antihéros crasseux et des bons sentiments qui reviennent du plus profond des tripes. Le personnage d English Bob permet aussi habilement de revisité et démystifier la légende du Far West.
Je trouve que ce film d'Eastwood ressemble pas mal dans la démarche aux derniers western de Ford : L'Homme qui tua Liberty Valance et Les Cheyennes en particulier.

alulu
20/07/2021 à 18:56

https://www.youtube.com/watch?v=FHtNOKDZq7A

Tu as toute les infos dans le descriptif.

Kyle Reese
20/07/2021 à 18:29

@ alulu

Quel est le titre du remake japonais ? Stp

alulu
20/07/2021 à 18:06

Un film cochon, tout est bon dedans. Sa musique mélancolique, l'histoire, les acteurs, le final expéditif, même son remake Japonais est très bon, c'est dire.

Ozymandias
20/07/2021 à 17:38

Maté y a pas longtemps, je l'ai trouvé sans plus perso... Déçu !

Kyle Reese
20/07/2021 à 16:36

Chef d’œuvre instantanée qui supporte le poids des années sans prendre une ride.

Faurefrc
20/07/2021 à 13:20

Chef d’œuvre… mais le meilleur western de Clint reste pour moi « Le bon, la brute et le truand ».

Flash
20/07/2021 à 12:31

Peut-être avec Josey Wales hors la loi, mon western favori.
Un chef d’œuvre de plus à mettre au crédit du monument qu’est Eastwood.